samedi, octobre 05, 2013

LE DEPART DU GENERAL GIAP, LE “NAPOLEON VIETNAMIEN”, L’HOMME QUI A VAINCU LES ARMEES FRANCAISE, ET AMERICAINE


Profitant de l’installation en France des “collaborateurs”, suite à la défaite en 1940 de la France face à l’Allemagne nazie, le Japon qui était alors l’allié de celle-ci, n’hésitera pas à exiger sous la menace, auprès de l’administration coloniale dépêchée au Viet Nam par Vichy, des facilités logistiques pour pouvoir mener sa guerre contre la Chine, et particulièrement le passage pour ses troupes à travers toute l’Indochine française, et la mise à sa disposition de terrains d’aviation.

Au fil du temps, ces exigences opportunistes furent multipliées et l’administration coloniale s’inclinant sans cesse, l’Indochine s’est retrouvée quasiment occupée par le Japon, à la façon même dont la France l’était par l’Allemagne, et ceci, avec le cortège inévitable d’exactions de l’occupant commises contre la population civile que l’administration française, tant par manque de moyens militaires que par manque de réelle préoccupation pour ces colonisés, ne parvint jamais à protéger.

Il vint de cet abandon que la population vietnamienne décida d’assurer elle-même sa défense et c’est ainsi qu’en 1944 fut créé un mouvement de résistance, le “Viet-Minh” à la fondation duquel participa le général Giap, et qui entreprit aussitôt de mener une guérilla contre l’occupant japonais.

Parce qu’ils avaient des visées territoriales sur l’Indochine, et pour pouvoir avoir les mains libres, tant pour leur guerre contre la Chine que pour mater la résistance vietnamienne, en mars 1945 les Japonais renversèrent l’administration française et prirent possession de l’Indochine, les vietnamiens se retrouvant seuls pour combattre l’ennemi.

Cependant, en aout 1945 le Japon est vaincu, et profitant du vide passager d’autorité, le Viet-Minh qui était d’obédience communiste et qui jouissant d’un grand prestige auprès de la population, proclama la “République démocratique du Viet Nam”, au moment même où le général de Gaulle qui ne l’entendait pas de cette oreille, dépêchait le général Leclerc avec un corps expéditionnaire, pour tenter de rétablir l’autorité française sur le Viet-Nam.

Dans un premier temps, compte tenu de ce que fut le lâche abandon de cette colonie par la métropole, et qu’on ne pouvait faire ainsi injure à ces gens qui avaient conquis par les armes et le sacrifice, leur liberté, et compte tenu également de la grande admiration que les chefs militaires français issus des Forces Françaises Libres, avaient pour ces vaillants combattants, on tenta de régler le différent par la négociation.

Mais entretemps, le général de Gaulle avait quitté le pouvoir et quand s’ouvre la conférence de Fontainebleau à l’été 1946, c’est face à des planqués qui n’avaient rien connu des épreuves de la guerre, face aux pires colonialistes, qui ne souhaitaient dans le fond rien d’autre que d’en revenir à ce système qui établissait les Vietnamiens en citoyens de seconde classe, que se sont retrouvés les patriotes. Et, bien que ceux-ci se montraient prêts à faire quelques concessions de souveraineté, pour s’établir dans les meilleures relations avec la métropole, ce que montrait leur présence même à cette conférence, les exigences et l’outrance méprisante des négociateurs français fut telle, que soudainement, le premier août, la délégation du Viet-Minh quitta la conférence.

Ce fut le début de la première guerre du Viet-Nam, qui fut une guerre criminelle à deux titres, puisque c’est la guerre que mène contre une nation qui ne lui à rien fait et qui ne lui est redevable de rien, puisqu’elle fut abandonnée, une nation prédatrice venue d’au-delà des mers pour la soumettre à son bénéfice, mais également parce que c’est pour l’essentiel avec des troupes coloniales, celles qui s’étaient si vaillamment battues pour sa libération, que cette métropole indigne et ingrate entendra mater d’autres colonisés en quête de leur liberté.

Cette guerre qui durera huit longues années, prendra fin suite à la défaite écrasante et humiliante de l’armée française établie dans la cuvette de Dien Bien Phu, et ne soupçonnant pas une seconde que l’audacieux général Giap fera transporter à travers la jungle impénétrable qui semblait être pour elle une protection, en pièces détachées par des sentiers boueux, à dos d’homme ou sur des bicyclettes aménagées pour cela, les pièces d’artillerie et les munitions qui, installées sur les collines environnantes, vont faire pleuvoir un déluge de feux sur les troupes ennemies stationnées dans la plaine.

C’est alors que vint l’heure de la négociation, la fameuse conférence de Genève et ses accords conclus en 1954, aux termes desquels il fut convenu de procéder au regroupement des forces antagonistes en deux zones distinctes, afin de pouvoir procéder au dégagement en bon ordre des forces françaises, et de procéder ensuite dans des conditions acceptables, à des élections qui devaient conférer son autorité au gouvernement d’un Viet Nam indépendant.

C’est ainsi que les forces communistes furent regroupées dans le nord, et les forces françaises et leur supplétifs vietnamiens dans le sud, selon un partage qui ne devait être que provisoire, mais qui durera plus de vingt ans...

Ceci, parce que malgré leur défaite militaire, les colonialistes français n’avaient pas renoncé à leur rêve de domination, et trahissant totalement l’esprit des accords, ils évacuèrent le pays, mais non sans avoir préalablement proclamé en toute illégalité et unilatéralement, un “état du Viet Nam du Sud”, associé à la France, avec pour capitale Saigon, et à la tête duquel ils placèrent sans à aucun moment s’inquiéter de consulter la population concernée, le fils de Duy Tan, l’ancien empereur d’Annam, qu’ils avaient pourtant déposé et exilé en 1916.

Ce fils s’était déjà proclamé lui-même empereur d’Annam, en s’opposant ainsi au Viet-Minh, dans la période de vacance du pouvoir de 1945, mais faute d’assise populaire, il avait du vite renoncer à son projet. Mais cette fois, il se faisait introniser par la puissance coloniale en prenant le nom d’empereur Bao Daï.

Les américains qui n’avaient un moment rien proposé de moins à leurs alliés français en difficulté et auxquels ils fournissaient l’armement, que d’utiliser la bombe atomique pour pouvoir réduire le Viet-Minh, et qui considéraient le communisme comme le mal absolu, ne faisaient aucune confiance à cet empereur et sa volonté de régner depuis Hué, l’ancienne capitale impériale située en limite de séparation des deux zones, sur la totalité du Viet Nam.

Car, cette réunification supposait l’application des accords de Genève et en particulier, l’organisation d’élections dans tout le pays qui risquaient fortement de porter les communistes au pouvoir. De plus Bao Daï était l’homme des Français.

En exerçant une pression sans pareille sur lui, les Américains vont alors contraindre Bao Daï à nommer comme chef du gouvernement un homme à leur solde, Ngo Dinh Diem, lequel se dépêchera d’organiser dès 1955 un référendum, afin d’abolir la monarchie et de déposer l’empereur Bao Daï.

S’estimant heureux d’avoir limité ce qu’ils considéraient comme étant une contagion communiste, à la seule partie nord du pays, les Américains manifesteront ainsi dès la mise en place de leur homme de paille, leur refus de voir à jamais organisé l’élection, prévue par les accord de Genève, qui permettrait d’établir une autorité unique sur tout le Viet Nam et que les communistes avaient toutes les chances de remporter.

Les patriotes vietnamiens comprirent alors que leur nation ne serait jamais réunifiée, tant que persistera le régime totalement illégal et illégitime établi dans la partie sud du pays, et c’est alors qu’ils formèrent un mouvement de libération dont les combattant portaient le nom de Viet Cong, ce sera le début de la deuxième guerre d’Indochine dite guerre du Viet Nam. Elle sera menée cette fois contre les Américains et leur supplétifs sud vietnamiens, comme un véritable combat de David contre Goliath où, depuis les batailles de Dak-To et de Da Nang, à l’offensive du Têt, qui furent si meurtrières pour les jeunes conscrits américains, tout le génie du général Giap s’exprimera à nouveau, jusqu’à la défaite de l’envahisseur.

Cependant, bien qu’il fut victorieux, cette bataille pour son indépendance aura eu un coût absolument effrayant pour le Viet Nam qui, sur la vingtaine d’années qu’elle aura duré, aura vu périr dans d’affreuses souffrances due au “napalm” pour beaucoup d’entre eux, plus de un million et demi de ses enfants, en plus de toutes les destructions, la pollution quasi définitive des sols par le terrible défoliant dit “agent orange”, que les Américains déversaient sur toute la contrée, pour que l’épaisse jungle ne soit plus l’alliée naturelle des maquisards.

Cet agent est la cause d’un nombre sans fin de malformations génétiques, et il faut encore ajouter à tout cela, le désastre complet que constituent les mines anti personnel qui furent éparpillées par dizaines de milliers sur tout le territoire, et qui aujourd’hui, près de quarante ans après la fin des hostilités, sont encore responsables tous les jours qui passent, d’affreuses mutilations...

L’épilogue de tout cela, c’est qu’après cette guerre criminelle pour l’empêcher de le devenir, le Viet Nam est justement devenu entièrement communiste, et ceci, sans qu’un seul américain n’en ait péri, que ces communistes évoluant avec leur temps, ont fait une ouverture chez eux à l’économie de marché, que le pays est en plein essor économique, et que les Américains dont la culture s’est répandu dans ce pays, constituent désormais un de ses principaux partenaires économiques. On se dit alors que s’il s’était trouvé aux Etats Unis en ces périodes, un homme suffisamment visionnaire pour être capable d’envisager positivement l’avenir, il aurait évité à notre humanité tout entière, le drame inhumain et totalement indigne que fut cette guerre...


Paris, le 5 octobre 2013
Richard Pulvar

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