Par son ordonnance du 10 juin 1670, Colbert, ministre de Louis XIV, interdit aux puissances étrangères de faire du commerce avec les Antilles (on n'est jamais si bien servi que par soi-même.) La Martinique, qui n'a eu à repousser jusqu'alors que 2 tentatives d'invasion de la part des Anglais en 1666 et 1667 va être vraiment en danger. Dès 1672, un millier d'hommes de troupe y restent en permanence et l'on accélère la construction du Fort St Louis.
La guerre éclate entre la France et la Hollande le 7 avril 1672, et le 8 juin 1674, l'amiral hollandais Michel Adrien Ruyter se lance à la conquête de la Martinique à la tête d'une armada composée de 18 vaisseaux de ligne, d'une vingtaine de flûtes (navires affectés au transport des troupes et du matériel) et de 6 brûlots (bâtiments chargés de matières inflammables et explosives destinées à incendier les navires ennemis.)
Le 19 juillet 1674, la flotte hollandaise est aperçue aux Anses d'Arlets, mais sa progression vers Fort Royal est ralentie par le manque de vent. Cela a peut-être sauvé la Martinique, car les Français, pris par surprise, ont eu une journée pour s'organiser.
Pour bloquer les vaisseaux ennemis, le Marquis de Baas, gouverneur général de la Martinique, fait couler plusieurs navires à l'entrée de la Baie du Carénage, et réunit une troupe de 161 hommes, composée des marins du vaisseau royal "les Jeux", de miliciens venus de St Pierre et de Fort-Royal, et de quelques colons, dont le plus célèbre est Guillaume d'Orange, qui a naguère combattu les Caraïbes aux côtés de Du Parquet.
Le 20 juillet, la brise matinale pousse les navires hollandais vers la Baie de Fort-Royal. Comme ils ne peuvent approcher, l'amiral Ruyter fait tirer au canon sur la savane envahie de roseaux qui s'étend sur la gauche du Fort pour couper toute résistance de ce côté-là et fait débarquer 4.000 hommes sur le rivage.
Côté Français, on fait défiler les 161 hommes disponibles sur le chemin de ronde, pour faire croire à une garnison plus importante. La ruse fonctionne, et les officiers hollandais, estimant que leurs hommes affaiblis par 40 jours de mer ont besoin de repos avant de se lancer à l'assaut d'un fort aussi bien défendu, leurs donnent quartier libre pour la journée. Les soldats hollandais trouvent les entrepôts du port ouverts comme par hasard et se jettent sur les barriques de rhum...
Un peu plus tard, les officiers flamands, ne connaissant pas encore l'alcootest, envoient à l'assaut des hommes ayant plus de 0.5 grammes d'alcool par litre de sang. C'est un carnage. Sous le feu croisé des Français embusqués derrière les palissades du Fort, des canons du Fort et de ceux du vaisseau royal "les Jeux" ancré dans la Baie du Carénage, les Hollandais laissent 1500 hommes à terre, morts ou ivres-morts.
Dans les rangs français, on déplore seulement 6 tués, dont le Marquis d'Orange. Cette bataille restera à jamais gravée dans la mémoire collective sous le nom de "Bataille du Rhum".
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