Le 22 septembre 1870, prolongeant les luttes de nos ancêtres pour la liberté et la dignité, éclatait la grande Insurrection du Sud de la Martinique.
Ces évènements surviennent à la suite de la condamnation à 5 ans de bagne d’un jeune Martiniquais, Léopold LUBIN, qui avait été cravaché, à Grands-Fonds, par un Européen, au prétexte qu’il n’aurait pas salué celui-ci et ne lui aurait pas cédé le passage. Après avoir vainement cherché réparation auprès des tribunaux français, Léopold LUBIN infligea alors une sévère correction au Français DE MAINTENON, en plein bourg du Marin.
L’Insurrection gagna l’ensemble du sud de la Martinique, jetant dans l’effroi ceux qui n’avaient pas renoncé à l’esprit esclavagiste. La répression fut terrible : tueries, exécutions d’insurgés au polygone de Desclieux, condamnations au bagne. Restent éternellement associés au soulèvement de septembre 1870 les noms de Louis TELGA, Eugène LACAILLE, Auguste VILARD, Rosalie SOLEIL, Madeleine CLEM, Lumina SOPHIE, Daniel BOLIVARD...
Au-delà des aspects évènementiels, l’Insurrection de septembre 1870 doit être considérée comme un puissant mouvement populaire contestataire remettant profondément en question l’ordre politique, économique, social et idéologique de la société post-esclavagiste de la fin du 19ème siècle. Elle a illustré, avec force, le courage, l’audace et l’esprit de sacrifice des insurgés, parmi lesquels les femmes et la jeunesse ont joué un rôle de tout premier plan. Elle a rassemblé, dans une même espérance, anciens esclaves, mais aussi Congos et Indiens nouvellement arrivés, préfigurant ainsi l’unité fondamentale de notre nation.
Aujourd’hui, 141 ans après ce grand soulèvement social et politique dont le théâtre des opérations se trouvait dans le Sud, notamment à Rivière-Pilote, nous Martiniquais, nous patriotes-souverainistes martiniquais, avons décidé d’unir nos forces pour acter cet évènement comme un moment majeur et incontournable de notre Histoire commune, au même titre que la révolution antiesclavagiste de mai 1848 qui conduisit à l’abolition de l’esclavage.
En cette année 2011, nous entendons ainsi agir dans l’unité pour honorer et célébrer nos héros disparus, assumer collectivement cette commémoration nationale et rendre meilleur le futur de la jeunesse martiniquaise, de notre peuple et de notre nation.
● Commémorer dans l’unité septembre 1870 est un devoir de mémoire
C’est la connaissance de leur histoire qui permet aux peuples de découvrir leurs héros, de croire en eux-mêmes et d’imaginer leur futur commun. Plus d’une quarantaine d’années après la première grande manifestation publique autour de l’Insurrection du Sud, nous considérons que le temps est venu de tirer de l’oubli les femmes et les hommes qui ont marqué cette belle et glorieuse page de notre Histoire. Le temps est venu de faire de cette date un évènement connu de tous, étudié et célébré avec la même ferveur populaire que le 22 mai 1848.
● Commémorer dans l’unité septembre 1870 répond à une obligation de transmission
Plus que jamais, en ces temps obscurcis, s’impose à nous l’obligation morale de transmettre et de consolider les valeurs de liberté, de dignité, de solidarité et de don de soi portées par les insurgés de septembre 1870 et qui incarnent des valeurs fondamentales pour toute l’humanité.
Aussi, dès cette année 2011, nous devons tout mettre en oeuvre pour que tous les lieux de formation de l’esprit et de transmission du savoir (la famille, les écoles, les universités, les mairies, etc…) soient impliqués dans cette démarche et que les moyens de communication (radios, télévision, internet, etc…) soient mis, sans condition et légitimement, au service des citoyens de Martinique.
● Commémorer dans l’unité septembre 1870 se veut une responsabilité inter-générationnelle
En nous inspirant de l’exemple des héros de 1870, il s’agit de créer, ensemble, une dynamique solidaire capable d’apporter une réponse à l’effondrement de la prise de conscience politique collective et des dérives qui en résultent.
● Commémorer dans l’unité septembre 1870 est une nécessité politique historique
Nous patriotes-souverainistes, nous entendons répondre, sur des bases responsables, aux exigences des désespérés et déshérités de la société, dans une Martinique plongée dans une impasse économique structurelle, sous la menace d’une crise internationale qui fait craindre le pire pour l’avenir.
Face à des systèmes qui les écrasent et les méprisent, les peuples du monde entier se réveillent pour proclamer leur aspiration à un monde plus juste, plus solidaire et plus humain. Notre pays n’est pas à l’écart de ce grand mouvement. Debout et unis, ces peuples se déclarent « indignés « des pouvoirs et des élites en place, qui les ont longtemps opprimés au bénéfice des profiteurs.
L’heure est donc venue, en cette année de célébration du 50e anniversaire de la mort de Frantz FANON, de reprendre à notre compte les revendications phares des protagonistes de l’Insurrection du Sud, qui confirment la pensée de Frantz FANON :
● La maîtrise de la Terre comme « matrice essentielle de notre patrimoine, car c’est elle qui nous donne le pain et la dignité ». Il convient d’élargir cette conception de la Terre à notre littoral qui sert de transition entre la terre ferme et la mer, laquelle est un espace d’ouverture au monde, la Caraïbe en particulier.
● La nécessaire prise de conscience que les possédants d’hier, encore maîtres d’aujourd’hui, doivent cesser tout diktat et toute pwofitasyon sur l’ensemble du pays. Ce qui nous conduit à revisiter la notion de conscience de classe dans le contexte des interdépendances engendrées par la mondialisation.
● La question identitaire sans laquelle aucune communauté ne peut se distinguer des autres et affirmer son authenticité et sa dignité, sans laquelle aucune communauté ne peut assumer la transition entre son passé et son présent, pour se projeter dans le futur.
● La revendication du pouvoir comme exigence politique assumée par des Martiniquais et pour des Martiniquais, en rupture avec le colonialisme français, dans le but de construire le destin de notre nation.
Nous appelons les Martiniquaises et les Martiniquais à se rassembler autour de ces idées forces, à faire peuple pour honorer la mémoire de nos héros connus et inconnus et hisser l’Insurrection de septembre 1870 à hauteur d’un évènement incontournable de notre patrimoine historique.
Les signataires
CNCP – MIM – MODEMAS - PALIMA
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