Face à la menace Britannique sur la colonie espagnole de la “Pâques fleurie”, dite en espagnol la “Pascua florida” d’après le jour où elle fut découverte, et qui sera dite plus tard plus simplement la Florida, c’est en 1689 que par un édit, le roi d’Espagne Philippe V autorisa les esclaves noirs fugitifs des colonies anglaises d’Amérique, à se réfugier en Floride. Ceci, afin de bénéficier de la liberté, mais en échange de servir dans une milice devant suppléer aux troupes espagnoles afin de s’opposer aux troupes britanniques.
Beaucoup d’esclaves de Caroline du sud et de Georgie, ayant eu connaissance de cette offre, se sont précipités vers la Floride pour y trouver refuge et liberté, même si bon nombre d’entre eux ne se sont finalement pas engagés dans cette milice. Mais ils ne furent pas les seuls car depuis quelque temps déjà, nombre d’Amérindiens fuyant eux aussi les persécutions britanniques, en particulier les Yamasee, les Hitchiti, et le Creek, avait également trouvé refuge en Floride.
Les milices eurent un instant raison des prétentions britanniques et c’est alors que partageant la même situation de réfugiés vis-à-vis des autres tribus indiennes, des autorités espagnoles et surtout, des colons espagnols qui avaient quant à eux réduit en esclavage 12 000 Amérindiens de Floride, et qui n’étaient guère mieux disposés vis-à-vis d’eux que les colons britanniques, ces noirs et ces indiens se sont alliés face à une commune adversité, celle que constituait les colonisateurs et les esclavagistes. Ceci, au point d’avoir donné naissance en peu d’années, à une communauté de métis qui sera dite “Séminole”.
Cette appellation découle du mot espagnol “cimarron” signifiant le “fuyard”, qui est devenu “cimano-li” puis “séminole”, et qui d’ailleurs parallèlement, a logiquement donné leur nom aux esclaves fugitifs dits “nègres marrons”, des Antilles…
Malheureusement pour elle, l’Espagne se trouvant alliée à la France durant la guerre de sept ans (1756-1763), elle se retrouvera dans le camp des perdants, de sorte qu’aux termes du traité de Paris de 1763 mettant fin à cette guerre, elle doit céder la Floride à la Grande Bretagne…
Mais ce ne sera pas pour longtemps car suite à la guerre d’indépendance menée par les Américains alliés à la France, contre la Grande Bretagne qui la perdra, le traité de Paris de 1783 qui met fin à cette guerre, imposera aux Britanniques de restituer la Floride à l’Espagne.
La jeune nation américaine éprouve alors le besoin de s’étendre territorialement, et après avoir très heureusement pour elle, obtenu en 1803 de la part de Napoléon qui avait un grand besoin d’argent pour poursuivre ses guerres, la cession de la totalité de la Louisiane de l’époque, laquelle représentait le quart des Etats-Unis d’aujourd’hui, alors même qu’elle n’espérait obtenir de lui que la Nouvelle Orléans, les dirigeants américains prétendront que l’ouest de la Floride faisait partie de la vente de la Louisiane, et en revendiqueront la possession…
Une première expédition américaine est donc menée contre la Floride, mais les Séminoles, hommes libres et désireux le demeurer ne l’entendent pas de cette oreille, et ce sera en 1817, le début de la première des trois “guerres séminoles”, qui opposeront farouchement les Etats-Unis d’Amérique à cette tribu de noirs indiens…
La première sera un désastre pour les Américains qui enverront 10 000 soldats secondés de 30 000 miliciens, pour défaire seulement 1400 Séminoles, mais qui repartiront en laissant 1500 hommes sur le terrain…
Cependant, l’empire colonial espagnol étant secoué par de violentes révoltes, particulièrement en Amérique du sud, et ne désirant pas s’engager dans une épreuve de force avec les Américains au risque de tout perdre, l’Espagne finira par céder la Floride à l’intérieur de laquelle demeurent les Séminoles, à ces Américains par le traité d’Adams-Onis de 1819. Les Séminoles obtiendront alors des Américains par le traité de Moultrie Creek en 1823, le droit de se rassembler et de s’établir dans une réserve au centre du pays…
Mais, c’est alors qu’arrive en 1835 comme 7ème président des Etats-Unis, un héros américain, Andrew Jackson, qui avait justement déjà combattu contre les Séminoles, et qui n’entend pas en rester là. Il fera approuver par le congrès un projet de déportation massive de ceux-ci, de l’autre coté du Mississippi, et ce sera le début de la deuxième guerre séminole.
Cette fois les Américains vont mettre le paquet, plus de 40 000 hommes contre un même nombre de Séminoles qui auront la bonne idée de ne pas leur opposer un front, mais de mener contre eux une guerre interminable de harcèlement, telle que ces Américains en connaîtront une autre bien plus tard au Viet Nam, et avec le même résultat. Cette guerre totalement démoralisante pour eux et devenue impopulaire, se poursuivra jusqu’en 1842 et ils perdront en tout plus de 1600 hommes, contre 540 Séminoles.
Cette fois encore le conflit se terminera par un accord autorisant les Séminoles invaincus, à s’établir dans une réserve, mais plus au sud dans le pays…
Cependant, l’armée humiliée, et les chefs de plantation ulcérés par le mauvais exemple que constituaient pour tous les hommes qui se trouvaient encore soumis à l’esclavage, la hardiesse des Séminoles, le gouvernement américain décidera d’en finir une bonne fois, ce sera la troisième guerre séminole qui débutera en 1855.
Déjà, depuis 1854, un embargo commercial avait été décrété contre les Séminoles et des colons provocateurs venaient squatter des terres aux abords de la réserve. Cependant, l’armée régulière ne disposait plus que de 800 hommes en Floride, même si elle se trouvait secondée par dix compagnies de milices. Ce sont en fait les Séminoles qui pour se dégager de la pression vont mener la première attaque, une attaque surprise contre une ferme et qui aura montré qu’ils entendaient bien mener la même tactique de guerre de harcèlement, pour ne pas offrir aux Américains le bénéfice de leur supériorité numérique. Beaucoup de Séminoles en effet, lassés de cette situation avaient fini par quitter la Floride…
Mais les Américains non plus ne cherchent pas l’affrontement direct, et construisent un ensemble de forts autour de la réserve pour y établir en quelque sorte un siège. C’est alors que sachant que les Séminoles sont maintenant moins nombreux, même s’ils demeurent toujours aussi farouches, il leur vient l’idée de s’en sortir en monnayant tout simplement l’affaire, et en leur proposant 500 dollars pour chaque guerrier qui acceptera de quitter la Floride, davantage pour les chefs, et 100 dollars pour chaque femme et enfant.
Le 4 mai 1858, 163 Séminoles seulement s’embarquent pour la Nouvelle Orléans, et le Colonel Loomis qui pense qu’il n’en reste plus qu’une centaine en Floride, déclare la fin de la guerre le 8 mai. Cependant, il se trompe, mais quand les Américains découvrirons qu’il y a encore des centaines de Séminoles en Floride, ils seront préoccupés par un problème bien plus sérieux, la guerre de sécession. Ils vont alors négocier avec eux, leur neutralité dans le conflit et obtenir leur accord, les Séminoles ne bougeront pas durant le conflit.
A la fin de la guerre, les troupes régulières seront rappelées, et les miliciens renvoyés chez eux, et tous les forts établis autour de la réserve seront démantelés. Pour les remercier de leur neutralité, les autorités de Floride leur accorderont un siège dans chacune des deux assemblées législatives de l’état, mais les Séminoles n’y siègeront jamais, ils resteront tranquillement chez eux, jusqu’à aujourd’hui, et invaincus…
Richard Pulvar