vendredi, avril 30, 2010

La Résistance noire à l’esclavage : ces noirs qui ont fait l’histoire

Une conférence avec Alain Vidal
La Résistance noire à l’esclavage : ces noirs qui ont fait l’histoire

à Nantes
Mercredi 5 mai à 20h15
Médiathèque Jacques Demy, Salle Jules Vallès (24, quai de la Fosse)

Des Amériques à l’Afrique, de la monarchie à la république. Une résistance à un racisme d’Etat au service du profit.
Cinq cents ans de résistance, cinq cents ans de silence. 1848, la France abolit l’esclavage, mais en 1881, Jules Ferry promulgue le Code de l’Indigénat : travail forcé, déportation, massacres pour l’exemple.
« Le travail forcé [aboli en 1946] c’est de l’esclavage »Elikia M’Bokolo, historien.
Aujourd’hui encore, des entreprises françaises font des profits dans des pays où sévit le travail forcé. L’étude de la résistance noire à la course au profit peut nous aider à changer le cours de l’histoire car :« Oublier ou ignorer l’histoire, c’est se condamner à la revivre »

Cette soirée s’inscrit dans un cycle de conférences programmées par le Collectif du 10 Mai. Le 10 Mai est la journée nationale de la Mémoire de la traite négrière,de l’esclavage et de leurs abolitions(28/04/10) Contact pour la conférence : vidal.mothes(a)wanadoo.fr

Programme du 10 Mai 2010

Programme du 10 Mai 2010


17H30 KA FRATERNITE (hommage des tambours à nos ancêtres)
18H00 Minutes de silence et recueillement autour de la Mémoire de Nos ancêtres

Remerciements au public de sa présence et de son soutien au COFFAD,et aux autres associations, qui font des marches ou des rassemblements de Commémoration depuis une dizaine d’années, et ce toujours à la Pce de la Nation. Et d’ores et déjà, nous vous donnons rdv au 10 Mai 2011, toujours à la Pce de la Nation. Merci pour la Mémoire de Nos Parents.

18H15 Dareen (Dates Historiques phares ; Résistantes Africaines du continent et d’ailleurs)
18H20 Jahfa Jah (Récit de son expérience ; noms des Antilles d’origine Africaine)
18H25 JLM (Zook en hommage à l’Afrique)
18H35 JYB(poête)
18H40 Philippe Cantinol (conteur)
Philippe CANTINOL porte en lui des  paroles libres : ce Passeur de Paroles est à la fois conteur et poète, poète et conteur. Diseur de temps et de sens. En sa qualité de dé-livreur de mots vifs, il sait créer chez son public une émergence d’émotions. Comme un artisan de l’instant présent.

En 2001, la République française reconnaît la Traite Négrière Transatlantique comme Crime contre l’Humanité, signons la pétition pour obtenir Réparations !!
Adresse de la pétition : http://www.lapetition.be/petition.php?petid=7036

18H50 KA FRATERNITE (hommage des tambours à nos ancêtres)
19H00 Intervention de Claudy Siar (Président de la radio Tropic FM que nous remercions fortement pour sa participation à l’organisation de cette commémoration)
19H15 Djibril Gningue (membre de AICAD)
19H20 Récit théâtral, animé par Mike, sur le lien entre GWO ka et Esclavage (accompagné
de la Kora et du Balafon).
20H05 Joby Valente (historique de la loi de 2001 ; pourquoi la Réparation…)
20H20 Yves Mununga (responsable de SHOMARI)
20H25 Youri (jeune haïtien donne son avis sur les Réparations)
20H30 Assani Fassassi (responsable du COFFAD Collectif des Filles et Fils d’Africains Déportés)
20H45 KA FRATERNITE (hommage des tambours à nos ancêtres)
21H00 FIN

Remerciements au public de sa présence et de son soutien au COFFAD,et aux autres associations, qui font des marches ou des rassemblements de Commémoration depuis une dizaine d’années, et ce toujours à la Place de la Nation. Et d’ores et déjà, nous vous donnons rdv au 10 Mai 2011, toujours à la Place de la Nation. Pour cela, afin de nous rejoindre dans l’organisation de cette marche, soit par vos idées (ou d’autres soutiens) merci de laisser vos coordonnées sur notre site internet www.coffad.net . A l’année prochaine, et merci pour la Mémoire de Nos Parents.

Lydia Child - 1802-1880 (États-Unis)

Lydia Child est née au Massachusetts. Elle devient enseignante et entre en contact avec les abolitionnistes.

Pour elle, le combat contre l’esclavage et celui pour les droits des femmes coïncident : ces deux groupes sociaux sont opprimés par les “blancs”.

En 1839, elle est élue au comité exécutif de la Société Anti-esclavagiste Américaine et devient éditrice du journal “National Anti–Slavery Standard”, hebdomadaire de la Société.

Au sein de la Société, elle lutte pour la représentation égalitaire des militantes féminines.

Elle quitte cependant ce mouvement à cause du manque de cohésion entre les membres et par opposition à l’usage de la violence pour obtenir l’abolition.

Son combat contre les préjugés continue cependant. En 1861, elle encourage Harriet Jacobs à publier son récit “Incidents in the Life of a Slave Girl”.

Henri Christophe - 1767- 1820 (Saint-Domingue)


Né de parents esclaves en 1767 sur l’île de Grenade, Henri Christophe est affranchi par un officier de marine français lors de la prise de Grenade sur les Anglais.

En 1790, il rejoint en Haïti la révolte des indépendantistes. Il s’impose rapidement comme l’un des chefs du mouvement et est nommé général de brigade par Toussaint Louverture. Il devient ensuite général en chef de Jean Dessalines, qui s’est proclamé Empereur de l’île en 1804.

En 1806, Christophe s’allie au général haïtien Alexandre Pétion pour renverser Dessalines, et se proclame, en 1807, président de la partie Nord d’Haïti. Une courte guerre civile oppose les partisans de Christophe à ceux de Pétion et, en 1811, Christophe se couronne roi, sous le nom de Henry 1er.

Le règne de Christophe est arbitraire, mais il contribue à l’expansion économique du pays, et est célèbre pour les édifices qu’il réalise, tels le palais de Sans-Souci et la citadelle Laferrière, près de Cap-Haïtien.

En 1820, alors qu’il est terrassé par une attaque qui le laisse partiellement paralysé, un soulèvement se déclare. Accablé, il met fin à ses jours dans son palais de Sans-Souci.

Aimé Césaire s’intéressera au drame de ce combattant dans sa célèbre pièce “La Tragédie du Roi Christophe” (1963).

Cimendef – 18ème siècle (La Réunion)

Marron d’origine malgache, Cimendef choisi lui-même son nom, une fois libre, s’étant enfui de la plantation où il était esclave. Construit à partir des mots “tsi” (non) et “mandevi” (esclave), Cimendef signifie en malgache “non esclave”.
Selon la mémoire orale réunionnaise, ce nom signifie aussi “Qui ne courbe pas la tête”. Quoi qu’il en soit, le nom que se donne cet homme indique sa volonté de résister et de vivre libre.


S’installant dans le Cirque de Mafate, il fonde une communauté de marrons, créant ainsi sur l’île un territoire libre (alors que les colons restent, eux, des “sujets” du Roi de France).

Tué vers 1752 par le chasseur de “noirs marrons” François Mussard, il marque l’île d’une empreinte indéniable.

« Je suis l’écho premier de l’éboulis qui s’enfle », lui fera dire le poète réunionnais Boris Gamaleya dans “Vali pour une reine morte”, long poème qui chante l’épopée des marrons réunionnais.

Cimendef a donné son nom à un piton de l’île dans le Cirque de Mafate.

Joseph Cinque/Sengbe Pieh – 1813(?)-1879 (Afrique)


Sengbe Pieh, fils d’un chef local, naît en 1813 dans la ville de Mani, dans le haut-pays mendé, en Sierra Léone (Afrique).

Agriculteur, il est attaqué et capturé, un jour de janvier 1839, par quatre hommes, puis est vendu à un négrier espagnol.

A bord d’un navire appelé Amistad, il est transporté, avec de nombreux autres captifs également originaires du Pays de Mendé, à destination de l’Amérique.

Alors que le navire est en pleine mer, les esclaves se révoltent. Sengbe Pieh prend la tête de la révolte et réussit à maîtriser le navire pour le faire accoster, en 1839, à Long Island, dans l’État de New York.

Sengbe Pieh et les autres captifs obtiennent leur liberté en 1841, après deux ans de détention passés aux États-Unis à attendre le verdict des tribunaux sur leur “révolte”. Grâce à leur ténacité, et grâce à des fonds collectés par les abolitionnistes, Senghe Pieh ainsi que les autres captifs regagnent la Sierra Léone.

Ce combat aura un impact considérable aux Etats-Unis en faisant avancer la lutte anti-esclavagiste.

Peter Clark - 1829-1925 (Etats-Unis)


Peter Humphries Clark est né à Cincinnati, d’un père affranchi et d’une mère métisse, d’origine irlandaise.

Son père, barbier, l’envoie dans des écoles privées où il fait des études brillantes.

Il devient enseignant, publie de nombreux ouvrages abolitionnistes et créé une revue abolitionniste hebdomadaire, “The Herald of Freedom”. Clark est particulièrement actif dans le combat pour l’accès des “noirs” à l’éducation, créant en 1866 le premier lycée public pour les Afro-américains. L’éducation est à ses yeux essentielle car elle permet d’obtenir de meilleurs emplois et de devenir actifs dans le combat pour l’égalité des chances.

Clark a été l’un des écrivains et orateurs abolitionnistes les plus connus de l’État de l’Ohio.

Thomas Clarkson - 1760-1846 (Angleterre)


Thomas Clarkson est né à Cambridgeshire (Angleterre) le 28 mars 1760. Politicien anglais, il est abolitionniste et protestant.

En 1784, dans “Le Cri des Africains contre les Européens leurs oppresseurs”, Thomas Clarkson pose la question suivante : « Est-il juste de faire contre leur volonté des hommes des esclaves ? ».

Avec Granville Sharp, il créé un Comité pour l’Abolition de la Traite des Noirs, relayé au Parlement par William Wilberforce. Ce mouvement devient populaire et se réorganise en 1787 en Society for Effecting the Abolition of the Slave Trade. L’abolition de la traite en est l’objectif concret. Ce mouvement se veut, comme la traite elle-même, international. Il cherche à diffuser auprès de l’opinion populaire des images fortes, capables de mobiliser les esprits.

Clarkson révèle ainsi au public britannique, en 1789, la vérité concernant la traite des “noirs” : pour dénoncer les traitements abusifs faits aux esclaves, il dessine un navire négrier, le Brooks.

Ainsi, les horribles conditions d’entassement dans les cales négriers sont pour la première fois visibles. Cette image est devenue l’une des plus fortes images de l’abolitionnisme.

« Quand Mirabeau vit [la gravure], il fut tellement impressionné qu’il demanda à un ouvrier de lui en faire un modèle réduit en bois, dépense considérable. Il conservait ce modèle dans sa salle à manger. C’était un bateau long d’environ un yard. On y voyait à leurs places respectives de petits personnages, hommes et femmes, peints en noir, figurant des esclaves ».

Extrait des mémoires de Thomas Clarkson

Lévi Coffin - 1798-1877 (Etats-Unis)


Marchand prospère, Lévi Coffin devient président de l’Underground Railroad (chemin de fer clandestin), nom donné au réseau abolitionniste dont la mission est d’aider les esclaves dans leur fuite des États du Sud vers les États ou l’esclavage a été aboli, ceux du Nord ou le Canada.

Les historiens estiment à 100.000 le nombre d’esclaves qui, entre 1810 et 1850, ont réussi à fuir les États du Sud grâce à ce réseau secret.

Pendant 35 ans, avec l’aide de son épouse, Lévi Coffin aidera plus de 2.000 esclaves à s’échapper. Tous deux ouvriront également une école d’alphabétisation pour les esclaves, organisée par un pasteur et ouverte le dimanche.

Guyana Coffy – ?-1763 (Guyane hollandaise)

Esclave de la plantation de Magdelenenburg (Guyana), Coffy dirige, entre 1762 et 1763, la principale rébellion quilombola de l’histoire de la Guyana actuelle.

A la tête de la révolte contre les colons hollandais, il est choisi comme représentant par les rebelles. Victorieux, il devient gouverneur de la colonie. Sa tentative de négociation d’un accord avec les Hollandais échoue. Ces derniers, plus de 10 mois après le début de la rébellion, massacrent les combattants de la liberté.

Cuffy deviendra un héros national.

A Guyana, en 1976, le gouvernement de Forbes Burnham rendra hommage à la lutte de Cuffy et ordonnera l’édification, dans la capitale Georgetown, d’un monument à son effigie.

Benjamin Constant - 1767-1830 (France)


Ecrivain, penseur et homme politique, Benjamin Constant est un partisan de la démocratie libérale. Ses interventions contre la traite sont en accord avec ses positions philosophiques selon lesquelles tout pouvoir doit être limité.

Secrétaire de la Société de la Morale Chrétienne, il exige, le 27 juin 1821 à la tribune de la Chambre des députés, et conformément aux engagements pris lors du Congrès de Vienne, l’application de la répression de la traite :

« La traite se fait : elle se fait impunément. On sait la date des départs, des achats, des arrivées. On publie des prospectus pour inviter à prendre des actions dans cette traite, seulement on déguise l’achat des esclaves en supposant l’achat des mulets sur la côte d’Afrique où jamais on n’acheta de mulets. La traite se fait plus cruellement que jamais parce que les capitaines négriers, pour se dérober à la surveillance, recourent à des expédients atroces, pour faire disparaître les captifs. [...]

Messieurs, au nom de l’humanité, dans cette cause, où toutes les distinctions de parti doivent disparaître, unissez-vous à moi pour réclamer la loi que le ministère vous avait promise ».

Samuel Cornish - 1790-1859 (Etats-Unis)


Né en 1790 de parents libres dans le comté du Sussex au Delaware, Samuel Cornish est un journaliste et abolitionniste Afro-américain.

En 1815, il va vivre à Philadelphie, puis à New York en 1821, où il organise une congrégation de presbytériens “noirs”.

À son ordination en 1822, il fonde sa paroisse, la New Demeter Street Presbyterian Church, qui devient la première église presbytérienne noire des États-Unis.

En 1827, il fonde avec John Russwurm le “Freedom’s Journal” (Le Journal de la Liberté), premier journal afro-américain aux Etats-Unis, au travers duquel il poursuit son combat pour l’abolition de l’esclavage. Le “Freedom’s journal” paraît jusqu’en février 1829 où il arrête sa publication pour des raisons financières.

Samuel Cornish rejoint en 1833 l’American Anti-slavery Society (Société Américaine contre l’Esclavage).

Charles Leconte de Lisle - 1818-1894 (La Réunion)


Charles Leconte de Lisle - 1818-1894

Poète né à Saint-Paul, Charles Leconte de Lisle est considéré comme le chef de file des poètes Parnassiens.

Si ses activités littéraires sont connues et reconnues (il succède à Victor Hugo à l’Académie française), ses activités politiques, et notamment son engagement contre l’esclavage, le sont moins. Ne supportant pas le régime esclavagiste, il se fâche avec son propre père, alors propriétaire de 42 esclaves, et choisit de quitter Bourbon.
Dès son arrivée en France, il prend publiquement position contre l’esclavage et devient un militant actif. Avec d’autres Réunionnais, comme le poète Auguste Lacaussade, il lance une campagne contre le système esclavagiste. Ils publient en 1848 “La pétition des jeunes créoles” où ils soutiennent le décret d’abolition définitive.
Sa famille ne le lui pardonnera pas ses positions politiques, et jusqu’à 1894, année de sa mort, il ne rentrera plus dans l’île.
Ses cendres reposent aujourd’hui au Cimetière marin de Saint-Paul.

René Levasseur - 1747-1834


René Levasseur - 1747-1834


« C’est donc à vous, mes jeunes concitoyens, que j’adresse mes Mémoires. Vous aussi, vous savez chérir la liberté qui fut la passion unique de toute ma vie, et j’ose dire, avec orgueil, que mes travaux, et ceux de mes amis, ont contribué à vous former pour son noble culte ». C’est ainsi que s’adresse l’homme politique René Levasseur au peuple français, en 1829, lors de la publication de ses "Mémoires".

Déshérité par son oncle parce que révolutionnaire, il lutte sa vie durant contre toute forme de négation de la liberté, dont celle instituée par la traite et par l’esclavage.

Député de la Sarthe, il fait voter à la Convention en 1792 la mort du Roi Louis XVI, puis, en 1794, l’abolition de l’esclavage. Lors de son intervention, il déclare : « Je demande que la Convention, ne cédant pas à un mouvement d’enthousiasme, mais aux principes de la justice, fidèle à la déclaration des Droits de l’Homme, décrète dès ce moment que l’esclavage est aboli sur tout le territoire de la République. Saint-Domingue fait partie de ce territoire, et cependant nous avons des esclaves à Saint-Domingue. Je demande donc que tous les hommes soient libres, sans distinction de couleur ».

Abraham Lincoln - 1809-1865 (États-Unis)


« À chaque fois que j’entends quelqu’un argumenter pour l’esclavage, j’ai une forte envie de le lui voir appliquer personnellement ! ». C’est en ces termes qu’en 1865, le premier président républicain des États-Unis d’Amérique, Abraham Lincoln, se prononce contre l’esclavage.

Dès le début de son premier mandat, en 1860, Lincoln affiche clairement ses opinions anti-esclavagistes, qui l’amène à mettre fin, par les armes, à l’esclavage sur le territoire des États-Unis. La guerre de Sécession (Civil War) oppose les États esclavagistes du Sud et les États abolitionnistes du Nord. C’est la guerre la plus sanglante sur le sol des États-Unis. Elle fera 620.000 morts et laissera des villes dévastées.
Lincoln dira au sujet des sudistes esclavagistes : « Ceux qui dénient la liberté aux autres ne la méritent pas eux-mêmes et sous un Dieu juste ne pourront la conserver ».
Lincoln sera assassiné en 1865. Quelques mois avant sa mort, il signera le 13ème Amendement de la Constitution américaine, qui abolit l’esclavage aux Etats-Unis.

Jermain Wesley Loguen - 1813-1872 (États-Unis)


Jermain Wesley Loguen - 1813-1872

Né esclave dans le comté de Davidson dans le Tennessee, Jermain Wesley Loguen décide, à l’âge de 21 ans, de s’enfuir au Canada pour y gagner sa liberté. Dès lors, il devient un abolitionniste actif et aide plus de 1.500 esclaves à s’enfuir.
En 1859, il entreprend l’écriture de ses mémoires, qu’il intitulera "The Rev. J.W. Loguen, as a slave and as a freeman : a narrative of real life" (Le Rev. J. W. Loguen, sa vie d’esclave puis d’homme libre), dans lequel il raconte son parcours vers la liberté.

jeudi, avril 29, 2010

6 JOURS POUR HAITI

LE TEMPS LANMEKANNFENEG 2010


TOUS LES ANS, du 8 au 23 mai, le Comité Marche du 23 mai 1998 (CM98) organise une série de 6 débats sur les sociétés issues de l’esclavage colonial, afin de comprendre comment elles ont été fabriquées dans l’univers esclavagiste. Le but est d’analyser l’impact de cette fabrication sur l’identité des descendants d’esclaves de la Caraïbe, des USA et de l’Océan Indien. Ces débats se déroulent dans le cadre du temps mémoriel ou temps Lanmèkannfènèg dédié aux victimes de l’esclavage colonial, instauré par le CM98 depuis 10 ans. Ce temps débute par 6 jours de réflexion appelés « chemin de fer » (en souvenir des conditions de vie inhumaines des esclaves) et s’achève par la commémoration du 23 mai au cours de laquelle les originaires des départements français d’outre-mer rendent hommage à leurs aïeux esclave

PENDANT 8 ANS, le chemin de fer n’a concerné que les Guadeloupéens et les Martiniquais. Des sujets aussi divers que la vie quotidienne d’un esclave, sa fabrication, les modalités de sortie de l’esclavage, les dysfonctionnements des familles matrifocales, la honte de la couleur de peau furent abordés. L’année dernière, nous nous sommes intéressés aux Békés, descendants d’esclavagistes martiniquais, et aux Haratines, esclaves et affranchis mauritaniens.

CETTE ANNÉE, bouleversé par la tragédie que vit Haïti à la suite du séisme, le CM98 a décidé de consacrer son chemin de fer à une meilleure connaissance du peuple haïtien. Qui sont ces descendants d’esclaves ? D’où tiennent- ils leur fierté, leur dignité et leur courage ? De leur histoire, de leur grande piété ? Comment expliquer la faillite économique d’Haïti ? Six jours pour Haïti afin de comprendre et soutenir nos amis haïtiens dans l’épreuve qu’ils traversent : tels sont nos objectifs pour ce chemin de fer que nous organisons en partenariat avec la plateforme des associations franco-haïtiennes (PAFHA). À cette occasion, nous solliciterons vos dons pour financer des projets ciblés que vous présentera la PAFHA.

STATION 1 : HISTOIRE DE L’ESCLAVAGE EN HAÏTI ET DE SA RÉVOLUTION ANTI-ESCLAVAGISTE
Intervenant : Dr Antoine Fritz Pierre, vétérinaire et directeur du journal Haïti Tribune
Modérateur : Pr. Serge Romana, président du CM98
Samedi 8 mai 2010. De 14h30 à 18h. Salle Max Jacob, 35 rue de Vienne, 93000 Bobigny. Métro Bobigny Pablo Picasso (ligne 5). Puis, tramway en direction de
Noisy-le-Sec. Arrêt Pont de Bondy.

STATION 2 : LES CAUSES DE LA FAILLITE ÉCONOMIQUE EN HAÏTI
Intervenant : Paul Eric Jean, doctorant en économie
Modérateur : Thierry Tabor, économiste
Dimanche 9 mai. De 14h30 à 18h. Foyer Jean Cocteau, salle E, 8 avenue Carnot 94190 Villeneuve-Saint-Georges. RER D, station : Villeneuve-Saint-Georges.

STATION 3 : LA FABRICATION DES DICTATURES EN HAÏTI DE 1804 À NOS JOURS
Intervenant : Eric Sauray, juriste, politologue et écrivain. Docteur en droit public
Modérateur : Frank Salin, journaliste et écrivain
Jeudi 13 mai 2010. De 14h30 à 18h. Salle Saint-Denys, 8 rue de la Boulangerie, 93200 Saint-Denis. Métro Saint-Denis Basilique (ligne 13).

STATION 4 : LA DIASPORA HAÏTIENNE : PARCOURS MIGRATOIRES ET INTÉGRATION EN FRANCE
Intervenant : André Bogentson, doctorant en démographie, Centre de Recherche en Population et Société (CERPOS), Université de Paris X
Modérateur : Romel Louis Jacques, secrétaire général de la PAFHA
Vendredi 14 mai 2010. De 18h à 22h. Salle Saint-Denys, 8 rue de la Boulangerie, 93200 Saint-Denis. Métro Saint-Denis Basilique (ligne 13).

STATION 5 : VAUDOU ET CHRISTIANISME
Intervenants : Edelyn Dorismond, doctorant en philosophie et Jean Zougbédé, docteur en psychologie clinique spécialisé en psychothérapie interculturelle
Modératrice : Viviane Rolle-Romana, docteur en psychologie clinique spécialisée en psychothérapie interculturelle
Samedi 15 mai 2010. De 14h30 à 18h. Salle Jacques Brel, 42 avenue Edouard Vaillant, 93500 Pantin. Métro Aubervilliers-Pantin-Quatre chemins (ligne 7).

STATION 6 : L’IDENTITÉ HAÏTIENNE
Intervenant : Edelyn Dorismond, doctorant en philosophie
Modératrice : Viviane Rolle-Romana, docteur en psychologie clinique spécialisée en psychothérapie interculturelle
Dimanche 16 mai 2010. De 14h30 à 18h. Salle Saint-Denys, 8 rue de la Boulangerie, 93200 Saint-Denis. Métro Saint-Denis Basilique (ligne 13).

mardi, avril 27, 2010

6ème Rencontres sur la Traite Négrière et l’Esclavage


Programme

Mardi 4 Mai à 20h30 à la Maison des Associations :

Conférence avec SURVIE ISERE :

- Olivier LE COUR GRANDMAISON (auteur de nombreux ouvrages Enseignant en Sciences Politiques (Université d’EVRY)),

- Odile TOBNER Présidente de SURVIE : (auteur de " Du racisme français : 4 siècles de négrophobie ")

Thème : Politique et Racisme d’Etat : Quelle continuité entre l’esclavage, la colonisation, la chasse aux sans papiers ?

La Maison des Associations : 6 bis rue Berthe DE BOISSIEUX / GRENOBLE (En face du Parc Hoche) Bus 13 : Arrêt " Marceau "

Mercredi 5 Mai à 20h à la salle polyvalente des Baladins :

Animation avec Afric ’Impact autour du projet : " Noire Egypte ?" de Nicolas GILL ES de retour d’Egypte

sur le thème : " Blanchiment de l’Histoire "

Salle polyvalente des Baladins (Quartier Villeneuve) : 85 galerie des Balladins / GRENOBLE, Tram A : Arrêt Arlequin (suivre fléchage), 06 37 86 37 38

Jeudi 06 Mai à 20h à la Maison des Associations :

Conférence avec le CADTM (Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers Monde) :

- Claude QUEMAR président du CADTM France

Thème : " De l’esclavage à la dette actuelle de l’Afrique : Quel lien ? Qui doit à qui ? "

Vendredi 7 Mai à 20h à la Maison des Associations :

Projection et débat autour du film : " Victor SCHOELCHER : l’abolition de l’Esclavage " de Paul VECCHIALI

La Maison des Associations : 6 bis rue Berthe DE BOISSIEUX / GRENOBLE (En face du Parc Hoche)Bus 13 : Arrêt " Marceau "

Samedi 8 Mai à 20h30 au Théâtre Prémol :

Pièce de théâtre : " EBENE " avec la compagnie DIRE D’ETOILE (5 euros)

Théâtre Prémol : 7 rue Henri DUH AMEL/GRENOBLE (Village Olympique), 04 76 84 93 34

Lundi 10 Mai :

" Journée de la mémoire de la Traite Négrière, de l’Esclavage et de leur abolition "

- 17h00 : Marche aux Tambours au départ de la place Félix POUL AT avec les groupes traditionnels (créoles) :

* COMBATUCADA

* KALADJA (lecture d’articles du " Code Noir ")

- 18h00 : Cérémonie officielle du 1O Mai, au Parvis des Droits de l’Homme devant la plaque " Toussaint LOUVERTURE " (Jardin de Ville-Musée Stendhal) avec les discours de :

* Michel DESTOT (Maire de Grenoble)

* Albert DUPUY (Préfet de l’Isère)

* Michel RAYNAUD (Président du CTNE)

suivi par le dépôt de gerbes et de la minute de silence, en hommage aux victimes de la Traite Négrière et de l’Esclavage.

Avec la participation des associations RACINES et CASOMI Felix POUL AT : Au pied de l’église, Tram A& B Arrêt : Victor HU GO

lundi, avril 26, 2010

Traite des blancs, traites des noirs

Auteur: Traite des blancs, traites des noirs, l'Harmattan, octobre 2008, 230 p.

par Maria Poumier

Sur l'origine de l'humanité, faute de la moindre science, on ne doit s'appuyer que sur la phylogenèse de nos mythes fondateurs. Ainsi, au lieu d'en rester à l'histoire médusante de la pomme et du serpent, qui fait que l'on soupçonne Dieu de malveillance imméritée en nous interdisant les fruits de l'arbre de la science, on devrait plutôt écouter sa conscience, et reconnaître que c'est le crime de cannibalisme contre nos semblables qui nous rassemble tous dans l'humanité pécheresse et à juste titre chassée du paradis. Comme les rats, comme les cochons, mais de façon bien plus systématique qu'eux, ce qui nous a rendus plus forts que d'autres espèces animales c'est que nous ne reculons pas devant le crime contre nos frères, et que c'est même notre nourriture hallucinogène, notre drogue vitale.

Les préhistoriens africains vont plus loin dans le dévoilement de notre inconscient coupable : ils affirment que du tronc noir, dans les contrées paradisiaques où l'on peut vivre nu et se nourrir simplement des fruits qui pendent aux branches, se sont détachés de pauvres types, des erreurs de la nature, blanchâtres et mauvais, probablement le fruit de quelque péché de leurs parents. Maléfiques, ils ont été chassés, maléfiques, ils ont dans leur errance survécu à force de crimes, maléfiques ils gardent une rancune sans fond contre la matrie-patrie chaude et noire. Leur malfaisance spécifique a inventé un outil spécifique : l'arme à feu, qui continue à répugner aux noirs.

Les préhistoriens européens et honnêtes modulent un peu la chose : ils affirment que l'homme tout à fait européen de Cromagnon était fort cannibale, comme les hommes d'ailleurs ; et ils ajoutent qu'il était aussi fort noir, n'ayant déteint que fort lentement, sous l'effet des brouillards et des glaces, qui lui ont aussi aiguisé le museau.

Quoi qu'il en soit, ceux qui écoutent leur âme brisée, ce qu'on appelle en langue occidentale leur vécu et l'appel de leur conscience, écrivent des livres méritant plus que les autres d'être lus et entendus. Rosa Amelia Plumelle Uribe est de ceux-là. Dans Traite des blancs, traites des noirs , sujet éminemment douloureux pour les uns et les autres, elle rend justice, et foudroie les fourbes. Voyons où elle porte ses coups :

• La censure chez les éditeurs et les lecteurs français s'abat sur ces sujets spécifiques : ainsi le principal chercheur dans le domaine de l'esclavagisme médiéval intra-européen reste à ce jour inédit en français : il s'agit de Robert Bartlett ; Anténor Firmin n'est parvenu à se glisser dans le catalogue de l'Harmattan que parce qu'une Américaine s'est battue pour cela, et a certainement frappé à bien des portes auparavant, sans susciter le moindre intérêt. Anténor Firmin le Haïtien était pourtant membre de la Société française d'anthropologie, et son monumental ouvrage De l'égalité des races humaines, essai d'anthropologie positive , de 1885, contient l'argumentation indispensable pour répondre au darwinisme, caution moderne de la hiérarchisation des races. Le belge Verlinden, qui a transmis tous les détails sur l'industrie juive des eunuques, florissante à Verdun, attend dans le même purgatoire que Cheikh Anta Diop qu'on daigne le lire ou, encore plus improbable, le citer. Il y a en outre pour tout ce qui touche à la grandeur de l'Afrique, une véritable censure préalable : ainsi l'ouvrage de Martin Bernal Black Athena , comme les recherches -pourtant 100% allemandes et donc éminément respectables a priori- de Léo Frobenius, sont toujours précédées, dans l'esprit des curieux blancs éventuels, de l'adjectif mental « loufoque » délayé dans la consternation apitoyée. On pourrait ajouter que l'ouvrage précédent de Rosa Amelia, La férocité blanche, des non-blancs aux non-aryens , s'il a bien été publié par Albin Michel, lui a aussi valu un tenace ostracisme à l'université.

• Les Arabes ont systématiquement pratiqué la traite des Africains avant pendant et surtout après la traite transatlantique. En dépit des merveilleuses sourates humanistes du Coran, ils sont aussi tenacement méprisants que les Européens pour les plus noirs qu'eux, et le prouvent tous les jours. Rien à envier aux catholiques, si bien équipés de leurs Evangiles mais dont le clergé ne remettait pas en question les camps de concentration qu'étaient les plantations esclavagistes, ni la législation qui les validait.

• Les intellectuels français sont ignobles, à mettre en scène leurs sophismes raffinés et leurs joutes dérisoires sur le thème de la repentance : le plaisir qu'ils y prennent donne la mesure de leur jouissance à ignorer que la demande des grands spoliés de l'humanité est une demande de réparation, nullement de culpabilité. L'esprit ailleurs, nos intellectuels se pavanent sur le marché de la mémoire, abaissant lorsqu'ils y sont contraints leur regard éthéré jusqu'à constater et reconnaître qu'il y a certes des masses de misérables qui crient famine et réclament justice, mais rendant grâce in petto de pouvoir s'offrir le luxe de les ignorer, de leur claquer la porte au nez, en leur rabâchant, s'ils crient trop fort, en guise de liniment, comme un certain Sarkozy faisant le beau à Dakar : bien fait pour vos gueules, vous qui vendiez vos frères.

• Les Africains avaient bien, comme d'autres, pour coutume de se refiler leurs captifs comme une marchandise éventuellement précieuse, il n'y a pas lieu de le nier. La différence entre LA traite des blancs et LES traites des noirs est que la traite entre Européens n'a pas ruiné l'Europe, c'était un aspect périphérique de l'économie, tandis que l'extraction forcée par d'autres du travail des Africains et de la sève de l'Afrique –avec expatriations et déportations, suivies de l'exploitation sur place, enfin dernièrement, interventionnisme de pure rapine– a parfaitement ruiné l'Afrique et continue de le faire. La facette la plus récente de la traite des noirs est l'émigration vers les pays riches « car l'appauvrissement de ces pays condamne à l'exil des populations affamées qui fuyant la misère et l'oppression viennent se masser aux portes de l'Europe où ils sont rejetés par les mêmes gouvernements qui ruinent leur pays » (p. 215)



Ce sont les quatre fronts sur lesquels ce livre attaque. Quelle envergure, quelle intelligence des causes et des effets, du ressort psychique soigneusement caché dans son imbrication avec le macroéconomique! La paresse et la pusillanimité universitaire se congratulent autour des ouvrages qui répètent toutes les trois pages des choses du genre : « il n'est pas aisé, on le voit, de trouver une solution satisfaisante à ce problème » [1] [celui de la définition de l'esclavage, celui des conséquences actuelles de l'esclavage pratiqué contre les Africains, et de tout autre phénomène réel d'ailleurs]. Les auteurs habituellement couronnés à l'université vous apprennent le moins possible de faits simples et documentés : ils ont pour but premier d'éloigner le vulgaire, qui, s'il fait la bêtise de gâcher ses précieux euros dans un livre savant, en retirera surtout l'avertissement qu'on perd son temps à chercher à savoir et à comprendre, parce que « c'est toujours plus compliqué que ça ».

Il faut lire Rosa Amelia, justement, pour apprendre énormément de faits incontestables de l'histoire de l'Afrique, des origines jusqu'à l'élimination systématique des meilleurs dirigeants, et pour comprendre leur articulation infaillible avec les intérêts impériaux européens et américains. Il faut lire Rosa Amelia pour se convaincre de la corruption mentale qui atteint même les organes réputés les plus à gauche. Les conclusions qu'elle en tire exigent aussi qu'on répercute ce qu'on apprend avec elle : c'est le propre des livres importants.

Rosa Amelia, Colombienne qui a épousé la France , est fière de la culture rurale de son enfance, et de la part africaine de son ascendance. La Colombie est réputée avoir la population noire la plus importante d'Amérique, en nombre. Les phénomènes de marginalisation et de discrimination y sont géographiquement voyants et statistiquement criants. Comme dans toute l'Amérique latine, les enfants de famille noire apprennent avant de savoir parler à assimiler l'humiliation comme indissociable de leur avenir. La réparation est donc, dans ce contexte, l'un des noms de la révolution sociale, de la réforme agraire et de la démocratisation à tous les niveaux du pouvoir. C'est une simple urgence intérieure, reconduite à chaque génération sous des appellations diverses. Cinq siècles de présence noire et de transfusions, en Amérique, donnent lieu à une pensée critique sédimentée, prudente et équilibrée : celle que nous transmet, en français, Rosa Amelia. C'est ce qui manque encore tellement à l'Europe, toute désorientée, chaotique et instinctuelle dans son rapport au monde noir.



Le livre de Rosa Amelia est un outil de combat pour l'extension des droits fondamentaux à l'existence et à la reconnaissance, non pas dans une logique de concurrence de minorités contre la majorité, mais d'humanisation de l'humanité. Aussi est-il généreux, l'auteur a confiance dans l'éducation, pour modifier un regard européen perverti par les pouvoirs néocolonialistes, et qui distillent un véritable poison par des médias et des financements culturels fortement biaisés. Rosa Amelia est convaincue que la découverte des Africains par les Européens, qui caractérise notre époque d'afflux démographique inédit, peut se faire sur la base du respect mutuel et de la solidarité naturelle face aux difficultés communes.

Mais les intellectuels patentés refusent d'envisager la redistribution des richesses et la restitution à l'Afrique de ses ressources et de sa souveraineté : voilà le sens profond de leurs cris d'orfraie sur le thème de la repentance. Ceci invite à penser qu'une réforme des manuels scolaires ne sera jamais suffisante, car une éducation réelle est toujours une métamorphose et une conversion. Et ce que réclame Rosa Amelia, et avec elle des millions de gens lucides, cela va très loin, c'est une révolution. Une révolution n'est pas forcément sanglante, elle peut être discrète et secrète. Mais elle exige toujours un moment d'excellence et d'exception, accompagné par un consentement radical, de la part des privilégiés, à l'abolition de leurs privilèges en faveur des déshérités. Le jour où le livre de Rosa Amelia recevra un prix du Sénat, oui, ce sera un signe que la France aura retrouvé le sens des valeurs ; et son esprit sera sauvé : car notre sens de l'humanité a connu un rétrécissement dramatique ces derniers siècles, n'en déplaise à notre vanité. Il y a un non-dit que les défenseurs de la thèse facile de « l'universalité de l'esclavage » s'efforcent en permanence de recouvrir comme une déjection animale : le fait que le pire traitement soit depuis si longtemps, et sur tous les plans, réservé à l'Africain, simplement parce qu'il est le voisin vaincu à plate couture depuis des siècles et des siècles. Or le vainqueur a toujours le devoir de relever le vaincu. Notre péché originel (concept reconnu par les penseurs des sociétés coloniales) est enfoui, il fait l'objet d'un déni : mais il est incontournable. Voilà pourquoi il donne lieu au tabou, à la gêne. Et voilà pourquoi le qualificatif de négationnisme lui convient. Il se surmonte dans les projets communs, les projets de dépassement commun, les héroïsmes.



Encore une qualité du livre de Rosa Amelia, voire un appât, pour ceux qui douteraient de nos cogitations féminines, toujours quelque part hystériques : il contient aussi des formulations radicales, aussi tranchées qu'équilibrantes, sur la question des rapports entre les juifs et les noirs, depuis Joseph vendu par ses frères jusqu'à Barack Obama ; et l'auteur remet courageusement les enjeux en place, autour de la puissance. L'alliance du très riche avec le très pauvre n'est pas naturelle, au contraire ; quand des personnalités rebelles résistent à la pente, c'est un phénomène marginal à saluer comme tel. Et pour finir, ce livre honnête et riche en citations étonnantes est équipé d'une bibliographie avec une part hispanique qu'on trouve rarement dans les ouvrages français ; il comporte aussi un index minutieux : un véritable outil de travail, quel que soit le niveau de spécialisation du lecteur.



[1] Olivier Pétré Grenouilleau : L'histoire de l'esclavage racontée en famille , Plon, 2008, p. 23, et suivantes. Ce livre est de façon visible une contre-attaque après celui de Christiane Taubira-Delanon : L'esclavage raconté à ma fille, Bibliophane-Daniel Radford, 2002. Il se veut simple et didactique, il l'est certes bien plus que l'abscons, creux et prétentieux Les traites négrières , scandaleusement encensé, recensé et récompensé par la bienpensance roupillante. Mais il s'arrête pile là où il faudrait du courage, et signaler les apports de la Françafrique à la modernisation de l'industrie de l'esclavage… Et c'est ici qu'on ne saurait se passer de Rosa Amelia et de ses maîtres.

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Ellen et William Craft - 1826-1891/1824-1900 (Etats-Unis)


William Craft, et sa femme Ellen, sont tous deux nés esclaves en 1826 et 1824.

Séparés de leurs parents respectifs par leurs maîtres, ils souhaitent éviter à leurs enfants le même sort, et mettent en place un plan fort audacieux. Ellen, qui a la peau claire, se déguise en un “gentleman du Sud” qui se rend à Philadelphie pour faire soigner son bras et sa mâchoire brisés. Cette ruse lui évite d’avoir à parler. Elle achète des billets de train pour elle et son mari, qu’elle fait passer pour son serviteur. Ils arrivent à Philadelphie en 1848, puis se rendent ensuite en Angleterre où ils demeurent jusqu’à la fin de la Guerre de Sécession.

Figures publiques et célèbres du mouvement abolitionniste, ils militent par le biais de conférences et de récits.

En 1860, ils publient “Une très longue marche vers la liberté”, l’un des plus fascinants récits d’esclaves jamais publiés.

« Nous avions totalement raison d’engager cette tâche dangereuse et excitante. Nous avions raison d’entreprendre cette très longue marche pour obtenir ces droits qui sont exposés de manière si éclatante dans la Déclaration d’indépendance ».

William Craft

Quabna Ottobah Cugoano - 1757- 1801 (Angleterre)

Né en 1757 au sein du peuple Fante dans le Ghana actuel, Quabna Ottobah Cugoano est kidnappé enfant et est vendu comme esclave.

Transporté aux Antilles, il travaille dans des plantations à la Grenade avant de partir pour l’Angleterre avec son maître, Lord Hoth, qui l’émancipe.

Il se fait baptiser afin de ne pas être remis en esclavage et entre au service de Richard Cosway, premier peintre du prince de Galles. Très vite, il se fait le porte-parole de l’anti-esclavagisme.

En 1786, avec le soutien de Granville Sharp, il aide à sauver Henry Demane, en passe d’être renvoyé comme esclave aux colonies.

L’année suivante, en 1787, il publie ses “Réflexions sur la traite et l’esclavage des Nègres”. Il s’agit de l’un des premiers écrits africains à atteindre un lectorat européen.

Son livre est à la fois une autobiographie et un manifeste politique, dans lequel il condamne la violence des razzias, les traitements inhumains à bord des navires et aux plantations, et accuse tous les Britanniques d’être complices de l’oppression des Africains, tant qu’ils ne s’insurgent pas contre la traite et l’esclavage.

Cugoano est le premier Africain à avoir publiquement réclamé en Europe par ses écrits l’abolition de la traite et de l’esclavage.

Louis Delgrès - 1766-1802 (Guadeloupe)


Métis né en 1766 d’une mère “blanche” et d’un père “noir”, Louis Delgrès devient sergent dans l’armée républicaine en 1791. Il mène le combat contre les Anglais qui le capturent lors de la prise de la Martinique en 1794.

Déporté en France, il revient aux Antilles en 1799 et organise en 1802 la résistance contre le général Antoine Richepanse venu rétablir l’esclavage en Guadeloupe sur ordre de Napoléon Bonaparte.

Le 10 mai, Delgrès rédige une proclamation intitulée “À l’univers entier, le dernier cri de l’innocence et du désespoir” dans laquelle il déclare : « C’est dans les plus beaux jours d’un siècle à jamais célèbre par le triomphe des lumières et de la philosophie qu’une classe d’infortunés qu’on veut anéantir se voit obligée d’élever sa voix vers la postérité, pour lui faire connaître, lorsqu’elle aura disparu, son innocence et ses malheurs. [...] ».

Le 28 mai 1802, après une résistance héroïque aux troupes de Bonaparte, Delgrès et ses 300 compagnons, plutôt que de perdre une seconde fois leur liberté, se suicident à l’explosif dans leur refuge de l’habitation Danglemont, à Matouba.

Dans sa déclaration du 10 mai 1802, il avait fait le serment de « Vivre libre ou mourir »

dimanche, avril 25, 2010

Jean-Jacques Dessalines - 1758-1806 (Saint-Domingue-Haïti)


En octobre 1802, il organise la mutinerie de l’armée de Saint-Domingue contre l’ordre bonapartiste de rétablir l’esclavage. À la suite de l’arrestation de Toussaint Louverture, il prend la tête du combat. Il finit par l’emporter sur les troupes napoléoniennes à la bataille de Vertières le 18 novembre 1803 et proclame, le 1er janvier 1804, l’indépendance d’Haïti.

Jean-Jacques Dessalines naît esclave à Cormiers, non loin du Cap.

Esclave d’un colon “blanc”, Henri Duclos, propriétaire d’une caféière, il est acheté, tout jeune encore, par Dessalines, un “noir” libre qui lui donne son nom.

En octobre 1802, il organise la mutinerie de l’armée de Saint-Domingue contre l’ordre bonapartiste de rétablir l’esclavage. À la suite de l’arrestation de Toussaint Louverture, il prend la tête du combat. Il finit par l’emporter sur les troupes napoléoniennes à la bataille de Vertières le 18 novembre 1803 et proclame, le 1er janvier 1804, l’indépendance d’Haïti.

Les lieutenants de Dessalines le proclament gouverneur général à vie de l’île d’Haïti. Ils jurent d’obéir aux lois émanées de son autorité, lui donnent le droit de faire la paix et la guerre, et de nommer son successeur.

L’hymne national d’Haïti, “La Dessalinienne”, est nommé en son honneur, de même que la ville et l’arrondissement de Dessalines.

samedi, avril 24, 2010

100 noms de combattants pour la Liberté


En 1743, à l’aide de 24 compagnons, Dimitile, probablement amoureux de l’esclave mozambicaine nommée Jeanneton, se rend dans la propriété de Pierre Hibon, dans les Hauts de Saint-Paul, et libère la jeune fille avec qui il s’enfuit.
Commence une longue marche à l’intérieur de l’île. Ils parcourent Mafate, Cilaos et la Rivière Saint-Étienne.
Dimitile, qui signifie “le guetteur” en malgache, devient le chef des marrons.

Si nous savons que, dans leur périple, les marrons dirigés par Dimitile croisèrent Mussard, le chasseur de Marrons, si nous savons également que Jeanneton le quitta, nous ne savons toujours pas ce qu’est devenu Dimitile, « le guetteur », chef de marrons.
Dimitile a laissé son nom à un pic de l’île dans les Hauts de l’Entre-Deux.

• Zumbi Dos Palmares - vers 1655-1695 (Brésil)

Zumbi Dos Palmares est né aux alentours de 1655 dans une des communautés de Palmares (“territoires autonomes”).

Vers 1662, alors qu’il est encore enfant, il est fait prisonnier par des soldats portugais aux frontières du territoire autonome. Il est livré au Père Antonio Melo qui le baptise et lui donne un nom chrétien, Francisco. Il passe des années à aider le Père Antonio à la messe et à apprendre le portugais et le latin.

Aux alentours de 1670, ayant à peine quinze ans, il s’enfuit et retourne à Palmares.
En 1675, alors qu’il a vingt ans, il se révèle être un grand stratège et un chef militaire lors des luttes contres les soldats du sergent Manuel Lopes.

En 1678, Pedro de Almeida, gouverneur de la région du Pernambouc, propose aux insurgés de se rendre : en échange, le pardon leur sera accordé et ils pourront reprendre leurs travaux d’esclaves sans punition, ni exécution. Zumbi refuse. Il prend la tête de la résistance dès 1680. Avec le soutien d’un groupe d’insurgés, Zumbi résiste courageusement durant une quinzaine d’années.
Après de vaillants combats, gravement blessé, il est contraint de prendre la fuite dans la jungle. Il meurt le 20 novembre 1695 au combat, dans la Serra Dois Irmãos.
Cette insurrection qui a duré près d’un siècle est la révolte d’esclaves la plus longue de l’histoire.

Zumbi est resté une icône de la résistance anti-esclavagiste et un héros pour la communauté afro-brésilienne, le Brésil et l’Amérique latine.

• Frederick Douglass - 1818-1895 (États-Unis)

Né esclave, Frederick Augustus Washington Bailey est le fils d’un “blanc” qui ne l’a pas reconnu et d’une esclave du Maryland.

Vers l’âge de douze ans, il est envoyé à Baltimore servir un dénommé Hugh Auld. Ce déplacement est l’un des évènements majeurs de sa vie sans lequel il n’aurait sans doute jamais pu apprendre à lire. Dès son arrivée, Sophia, la femme de Hugh Auld, lui apprend les rudiments de la lecture. Mais elle arrête rapidement les leçons, sévèrement rappelée à l’ordre par son mari pour avoir enfreint la loi en apprenant à un esclave à lire.
Frederick Augustus Washington Bailey n’abandonne pas. Dès qu’il peut échapper à la surveillance de sa maîtresse, il négocie contre du pain des leçons auprès de jeunes enfants “blancs”, pauvres, mais instruits, du voisinage.
Alors qu’il travaille dans le port de Baltimore, Douglass réussit à s’enfuir, en 1838, en se faisant passer pour un marin “noir” libre. Il se rend à New York et prend le nom de Frederick Douglass. Dès lors, il se bat pour la libération des esclaves. Très actif dans le “chemin de fer clandestin”, il publie plusieurs livres dont, en 1845, une magnifique autobiographie, “La vie de Frederick Douglass, esclave américain, écrite par lui-même”. Il y dénonce le système esclavagiste.

En 1847, il fonde “The North Star”, un journal abolitionniste. Il devient ensuite conseiller d’Abraham Lincoln, puis consul général à Haïti. Il consacre sa vie à la lutte pour les droits civiques. En 1895, lorsqu’un jeune étudiant noir vient lui demander comment faire avancer cette cause, il lui répond : « Allez-y ! Manifestez ! Manifestez ! Manifestez ! ».

Claire Louisa Rose Bonne, Duchesse de Duras - 1777-1828 (France)

Madame de Duras est née à Brest en 1777 d’un officier de marine, favorable à la cause de la Révolution, mais parce qu’il est opposé à la condamnation de Louis XVI, est décapité en 1792. Après un séjour à la Martinique, où son père avait laissé des biens et d’où sa mère était originaire, puis aux États-Unis, et en Suisse, Madame de Duras s’établit à Londres, où elle épouse Amédée de Duras, dont elle aura deux filles. De même que de nombreux aristocrates, elle rentre en France fin 1799, après le coup d’État du 18 Brumaire.

C’est lors de son séjour à Londres qu’elle rencontre l’écrivain François-René de Chateaubriand, qui l’encourage fortement à publier ses romans.

Le premier d’entre eux, “Ourika” (publié en 1823), retrace les déboires amoureux d’une jeune Africaine qui, ne pouvant épouser l’homme qu’elle aime à cause de la couleur de sa peau, se retire dans un couvent pour se laisser mourir.

Dans ses ouvrages, Claire de Duras traite de sujets complexes et controversés, avec principalement des personnages opprimés et marginalisés que leur couleur de peau ou leur origine sociale empêche de connaître le bonheur. L’égalité, tant raciale que sexuelle, est au cœur de ses livres.

Sans doute trop en avance sur son temps, son œuvre littéraire, longtemps considérée comme de petits romans sentimentaux sans importance, a été marginalisée jusqu’au 20ème siècle.

Élie - 19ème siècle (La Réunion)

En 1810, les Anglais envahissent l’archipel des Mascareignes et débarquent, le 7 juillet 1810, à Saint-Denis.
L’occupation anglaise durera cinq ans sous le commandement de Sir Farquhar.

Le 8 novembre1811, Élie prend la tête d’un soulèvement de près de 200 esclaves à Saint-Leu. La répression est extrêmement brutale car le gouverneur et les colons veulent décourager toute nouvelle initiative.

Le 11 février 1812, l’église de Saint-Denis se transforme en tribunal et 30 condamnations à mort sont prononcées.
Élie, quant à lui, est déporté par les Anglais, mais on ne connaît pas la suite de sa vie.

Olaudah Equiano - 1745-1797 (Angleterre)


Né vers 1745 dans le Sud-Ouest de l’actuel Nigéria, Olaudah Equiano est enlevé par des marchands d’esclaves à l’âge de 10 ans.

Vendu à maintes reprises après avoir été amené aux Amériques, d’abord à un planteur de Virginie, puis à un officier de la marine britannique qui l’offre comme cadeau à ses cousins, il travaille comme esclave durant une dizaine d’années sur un vaisseau négrier.
Il réussit à mettre suffisamment d’argent de côté pour pouvoir acheter, en 1776, sa liberté.

À partir de 1777, alors installé en Angleterre, il se consacre à la lutte pour l’abolition de la traite négrière et de l’esclavage colonial, notamment en écrivant de nombreux articles dans les journaux.

En 1781, il fait inculper le capitaine d’un navire négrier, le Zong, pour avoir fait jeter à la mer 132 captifs, avec l’intention de toucher la prime d’assurance. Ce procès est un épisode célèbre de la lutte contre la traite.

En 1786, il dirige une expédition destinée à installer d’anciens esclaves des plantations américaines au Sierra Léone. Il devient l’un des principaux porte-parole du mouvement abolitionniste et présente, en 1788, au roi et au Parlement britannique, une pétition pour l’abolition de la traite négrière.

Equiano publiera ses mémoires en 1789. Le succès sera immédiat, et le livre, qui connaîtra neuf rééditions, aura un immense retentissement. Il sera traduit en français sous le titre “Olaudah equiano ou Gustavus Vassa l’Africain : Le passionnant récit de ma vie”.

Benjamin Franklin - 1706-1790 (Etats-Unis)

Benjamin Franklin est né le 17 janvier 1706 à Boston dans la Colonie de la baie du Massachusetts.
Ce physicien, écrivain et diplomate est l’un des personnages les plus illustres de l’histoire américaine.
Il prend rapidement position contre l’esclavage et affranchit ses propres esclaves en 1772.
Il devient, en 1787, Président de la Société Pennsylvanienne pour l’Abolition, soutenue par les Quakers, groupe protestant très progressiste. Les Quakers sont les premiers Européens à interdire à leurs membres de posséder des esclaves. Ils sont très actifs dans la lutte contre la traite et l’esclavage, en Angleterre comme aux Etats-Unis.
Benjamin Franklin s’enthousiasme à Londres pour l’instruction des “noirs”, et converse longuement en France avec Condorcet.
Il renoncera cependant à présenter une pétition pour l’abolition, craignant la réaction des Etats esclavagistes du Sud.
Il meurt à Philadelphie le 17 avril 1790, à l’âge de 84 ans.

James Forten – 1766-1842 (Etats-Unis)

Afro-américain né libre, James Forten invente dès l’âge de 14 ans un type de voile qu’il trouve approprié pour de plus grandes vitesses de manœuvres et de maintien des bateaux.
Devenu homme d’affaires, sa découverte lui permet de faire fortune, qu’il utilise alors pour servir la cause abolitionniste.

Benjamin Sigismond Frossard - 1754-1830 (France)

Né en Suisse en 1754, Benjamin Sigismond Frossard s’installe à Lyon en 1877. Intellectuel engagé, il est très impliqué dans les réseaux de sociabilité de la ville, ce qui va le conduire à un engagement politique important.
Son engagement le plus marqué et le plus constant est en faveur de la cause abolitionniste. Un voyage en Angleterre en 1784-1785 l’amène à nouer des relations avec les principales figures du mouvement abolitionniste anglais dont Thomas Clarkson et Granville Sharp.

Frossard participe à la fondation de la Société des Amis des Noirs, association française créée en 1788 dont le but ultime est l’abolition de l’esclavage.
Grâce à cette association, Frossard entretient des relations avec les sociétés abolitionnistes à travers le monde. Elle fait campagne dans la presse pour l’abolition de l’esclavage et travaille à sensibiliser les Français à cette question.
Les campagnes ont un impact : 49 cahiers de doléances sur 600 mentionnent, dans leurs revendications, l’abolition de l’esclavage.
Apparus au XVème siècle, les cahiers de doléances recensent les revendications et les plaintes émises au niveau local par chaque ordre de la société (clergé, noblesse et tiers état) lorsque le Roi décide de faire appel aux Etats Généraux.

Furcy – 19ème siècle (La Réunion)

En 1817, le jeune Furcy découvre que sa mère avait été affranchie avant son décès et décide de recourir à la justice pour faire valoir sa liberté, une liberté dont jouit sa sœur Constance qui a été affranchie.
Il entreprend cette démarche alors qu’il est à la tête de la maison du négociant et propriétaire d’esclaves Joseph Lory, qui lui fait confiance.
Débouté en première instance, il fait appel et se pourvoit finalement en cassation.
L’affaire fait grand bruit à Saint-Denis car elle pourrait ouvrir la brèche à la libération de 15.000 esclaves.
Après vingt-trois années de lutte judiciaire, il remporte enfin la victoire et devient un homme libre.

William Lloyd Garrison - 1805-1879 (Etats-Unis)

Enfant, William Loyd Garrison commence très tôt à travailler, afin de financer ses études, et entreprend lui-même son éducation. Très vite il se lie à la cause abolitionniste, combat qu’il mènera corps et âme durant toute sa vie.

Président de L’American Anti Slavery Society de 1843 à 1865, Garrison défend ardemment l’égalité des droits pour les “noirs”, dénonçant fermement l’immoralité du commerce d’êtres humains.
Il lance en 1831 à Boston le premier numéro du journal “The Liberator”, dans lequel il réclame la liberté des “noirs” et déclare : « je ne tergiverserai pas — je n’excuserai pas — je ne reculerai pas d’un seul pouce — ET JE SERAI ENTENDU ».

En 1854, suite à l’échec de la libération de son ami Anthony Burns, renvoyé en esclavage, Garrison brûle, devant près de 3.000 personnes qui l’acclament, une copie de la Constitution américaine à Framingham dans l’Etat du Massachusetts, en déclarant à la foule qu’elle « est un pacte avec la mort et un accord avec l’enfer ».
Il parvient en 1855 à convaincre l’Etat du Massachusetts d’ouvrir les écoles publiques aux jeunes “noirs”. Désapprouvant au départ la politique d’Abraham Lincoln (qui deviendra le premier président républicain de l’histoire des Etats-Unis), il se rallie progressivement à la cause du candidat républicain et lui apporte son soutien.
En décembre 1865, après l’abolition de l’esclavage aux Etats-Unis, il publie le dernier numéro du “Libérateur” en déclarant sa mission d’abolitionniste terminée.

Marie Gouze, dite Marie-Olympe de Gouges - 1748-1793 (France)


Marie Gouze, dite Marie-Olympe de Gouges.

Femme de lettres devenue femme politique, Marie-Olympe de Gouges a beaucoup écrit sur les droits civils et politiques des femmes et sur l’abolition de l’esclavage.
Sa pièce de théâtre “L’Esclavage des Noirs” (1792) la rend célèbre. Inscrite au répertoire de la Comédie-Française en 1785, sous le titre de “Zamore et Mirza”, cette pièce veut attirer l’opinion publique sur le sort des esclaves des colonies. Cependant, à la suite de la première représentation, la pièce anti-esclavagiste est retirée du répertoire de la Comédie, qu’elle ne réintègrera qu’à la Révolution française.
Malgré les pressions, les harcèlements et même les menaces des défenseurs de l’esclavage colonial à l’encontre d’Olympe de Gouges, cette combattante, soutenue par le Club des Amis des Noirs, reste très active.
En 1788, ses “Réflexions sur les hommes nègres” lui ouvre la porte de la Société des Amis des Noirs, dont elle devient membre.
En 1790, elle composera une nouvelle pièce de théâtre, sur la même thématique que “L’esclavage des noirs”, intitulée “Le Marché des Noirs”.

Alexandre Gatine - 1805-1864 (France)

Alexandre Gatine, avocat de profession, est employé aux Affaires des colonies en 1831. Il publie alors une brochure intitulée : “Pétition à la Chambre des députés relative au droit dénié aux esclaves de se pourvoir en cassation”.
En 1844, Gatine s’illustre dans l’affaire “Virginie” où il défend une affranchie guadeloupéenne réclamant la liberté de ses enfants selon l’article 47 du Code Noir.
En 1848, Schoelcher le charge de préparer les projets des décrets relatifs à l’abolition de l’esclavage. Le gouvernement provisoire adopte ses décrets le 27 avril et le désigne comme commissaire général de la Guadeloupe, chargé d’appliquer, sur le terrain, le décret d’abolition.
En 1864, quelques mois avant sa mort, Gatine évoquera dans un poème intitulé “Souvenirs d’un abolitionniste” la révolution de 1848, l’abolition de l’esclavage et son arrivée en Guadeloupe.

« Le ciel enfin sourit aux martyrs sans couronnes
Un orage soudain éclata sur les trônes.
Le peuple nous prêta sa puissance d’un jour,
Seule œuvre de ce temps féconde et sans retour
L’esclavage n’est plus qu’un immonde fantôme
Ecrasé par la foudre : et le serf s’est fait homme !
Hosanna sur la terre. Hosanna dans le ciel !
Dieu bénit notre loi, décret providentiel,
Soyons ses messagers, conduits par ses étoiles,
Portant la liberté dans les plis de nos voiles,
Ainsi l’esprit divin "reposant sur les eaux"
Illumina le monde au sortir du chaos
».
Alexandre Gatine

Thomas Garrett - 1789-1871 (Etats-Unis)

Issu d’une famille d’abolitionnistes, Thomas Garret est un véritable leader dans The Underground Railroad (Chemin de fer clandestin).

Très actif, il aide des milliers d’esclaves à fuir leur servitude en les conduisant des Etats esclavagistes du Sud vers les Etats du Nord ou vers le Canada, grâce à un réseau de sentiers secrets, de cachettes et de maisons d’accueil.

Sarah Grimke - 1792-1873 (États-Unis)


Sarah Grimke - 1792-1873

Avec sa sœur Angelina, Sarah Grimke est parmi les premières femmes américaines à avoir lutté publiquement contre l’esclavage.
Fille d’un planteur de Caroline du Sud, elle est marquée par la condition des esclaves et particulièrement par les sévices subis par les femmes.
Imprégnée par le renouveau évangélique, elle quitte, avec sa sœur, le Sud et se rend à Philadelphie pour rejoindre une communauté Quaker au sein de laquelle elles rencontrent des abolitionnistes militants.
Dès 1836, elles commence une tournée des groupes abolitionnistes féminins en Nouvelle-Angleterre et à New York. Elles sont en butte aux critiques des Églises protestantes qui jugent leur conduite incompatible avec leur “rôle” de femmes.
Les sœurs Grimke militent leur vie durant pour l’émancipation des esclaves et des femmes.

Héva – 18ème siècle (La Réunion)

Compagne du chef marron Anchaing, Héva est la première femme réunionnaise dont on connaît la lutte pour la liberté et contre les humiliations de l’esclavage.

Louis Timagène Houat - 1809-1880 (La Réunion)

Mulâtre, Louis Timagène Houat est un acteur important de la vie politique et culturelle réunionnaise du XIXème siècle.
Accusé d’avoir fomenté avec des mulâtres et des esclaves un complot du côté de Saint-André, il est banni et condamné, en 1836, à être exilé sur le continent européen. Révolté, il se positionne alors clairement contre l’esclavage. Depuis Paris, son lieu d’exil où il fréquente les abolitionnistes parisiens, il publie son unique roman, le premier de la littérature réunionnaise, “Les Marrons” (1844). Il s’agit d’une histoire d’amour entre une jeune femme “blanche” et un marron. À travers ce roman, il critique fortement le système colonial et fait l’apologie de la liberté.
En 1849, son exil terminé, Louis Timagène Houat rentre dans l’île, où il se présente à des élections contre celui-là même qui l’avait banni. Déçu par les manipulations des votes et trucages des élections, il quitte définitivement l’île pour aller à Paris, où il étudiera la médecine.

Harriet A. Jacobs - 1818-1897


Harriet Jacobs est née en 1813 en Caroline du Nord. Elle est la fille d’un homme libre, mais sa mère étant esclave, elle l’est aussi. Harriet Jacobs refusera toujours ce destin d’esclave, en commençant par apprendre à lire et à écrire.

Encore adolescente, elle devient mère de deux enfants dont le père est un jeune avocat “blanc”. Comme son maître menace de l’envoyer travailler dans une plantation, elle s’enfuit et se réfugie chez sa grand-mère, femme libre. Elle y reste sept ans, cachée dans une soupente, puis s’enfuit à New York où elle trouve du travail comme gouvernante. Recherchée par son maître, elle continue sa fuite, à Boston, puis en Angleterre, où elle milite au sein du mouvement des femmes abolitionnistes.

En 1852, l’American Colonization Society, dirigée par James Madison, la rachète et l’affranchit.
À partir de 1853, elle entreprend de raconter son histoire, dont certains extraits sont publiés dans les journaux. Un premier extrait paraît sous le titre “Lettre d’une fugitive” dans le “Tribune”, un journal New-yorkais.

En 1858, elle met le point final à son manuscrit. L’ouvrage, intitulé “Incidents in the Life of a Slave Girl”, (Incidents dans la vie d’une jeune esclave) est publié en 1861 à Boston, puis édité à Londres l’année suivante. Il connaît un grand succès. Harriet Jacobs met à profit sa célébrité pour aider les esclaves ; elle organise des écoles, des orphelinats, et des maisons de retraite.

Jean Kina 1755- ?

Jena Kina est né vers 1755 à Saint-Domingue. Esclave, il refuse cependant plusieurs fois sa liberté, avant de finalement l’accepter.

En 1792, il devient chef d’un bataillon de plus de 200 Libres de couleur, à la solde des planteurs de Saint-Domingue. Sous ses ordres, les hommes du bataillon écument les montagnes de l’île pour prendre en chasse les marrons. Ils remportent de nombreuses victoires, et leurs services sont très appréciés des colons.

En 1798, Kina est contraint de quitter Saint-Domingue, et c’est ainsi qu’il se retrouve, entre 1800 et 1801, à la Martinique. Dans cette île, il prend conscience des atrocités que subissent les esclaves, et décide alors de lutter pour la liberté.
Un membre du Conseil colonial de la Martinique raconte : « Il était parti de Fort Royal, dans la soirée du quatre octobre 1800, pour aller établir un camp sur le Morne Lemaître. Il avait passé, avec sa petite troupe, par la Case Navire et quelques habitations pour y faire des partisans. Il déclarait qu’il venait de la part de Dieu et du Roi, et il portait un drapeau sur lequel était écrit : “La Loi britannique”. Il était chargé, disait -il, de protéger ses frères, parce que les Colons étaient des bourreaux et des mangeurs de chair humaine ; qu’ils faisaient avorter les négresses à force de travail et qu’ils étaient décidés à vendre les nègres libres ».

En 1801, dans la région du Carbet, avec une vingtaine de compagnons de combat, Kina est à la tête d’un soulèvement, forçant ainsi le pouvoir colonial à la négociation. Ce qu’il souhaite : l’amnistie générale pour tous les esclaves. Mais l’esclavage ne sera aboli en Martinique qu’en 1848. On ne connaît pas la fin de sa vie.

Joseph Ignace - 1769-1802

Né en Guadeloupe, à Pointe-à-Pitre, en 1769, Joseph Ignace est charpentier de formation. Esclave, il décide de briser ses chaînes en devenant marron, en se retirant dans les bois.

En 1794, il entre dans l’armée coloniale et devient capitaine en 1801. Joseph Ignace s’oppose fermement au rétablissement de l’esclavage, décrété en 1802 par Napoléon Bonaparte.
Désireux d’appliquer à tout prix ce décret en Guadeloupe, le général Antoine Richepanse donne l’ordre, le 6 mai 1802, de rassembler tous les soldats près de Pointe-à-Pitre, dans la savane de Stiwenson.
Fort de ses convictions, Ignace refuse d’obéir et s’enfuit. Il se rend à Petit-Canal, où il s’embarque pour rejoindre le 8 mai, à Basse-Terre, la résistance mise en place par Louis Delgrès.

Le 22 mai, les résistants décident d’évacuer le fort Saint-Charles et de se scinder en deux groupes, dont l’un est commandé par Ignace. Refusant d’être capturé vivant, Joseph Ignace se suicide trois jours plus tard, d’une balle tirée en pleine tête.
Delgrès et ses compagnons le suivront dans la mort.

vendredi, avril 23, 2010

"La reconnaissance des différences et des altérités"



L'un mourut à 94 ans, après une carrière littéraire et politique accomplie, l'autre se consuma à 36 ans, laissant une oeuvre brûlante et avortée. L'un magnifia sa Martinique natale, l'autre préféra se jeter dans les combats indépendantistes en Afrique. L'un eut des obsèques en forme de béatification en 2008, l'autre s'éteignit anonymement dans un hôpital en 1961. Même si leurs existences paraissent largement antithétiques, Aimé Césaire et Frantz Fanon furent les artisans d'un même combat anticolonialiste. Dans Aimé Césaire, Frantz Fanon, Portraits de décolonisés (Les Belles Lettres, "L'histoire de profil", 280 p., 27 €), Pierre Bouvier, professeur à l'université Paris X-Nanterre, jette des passerelles entre ces deux figures intellectuelles. Entretien.

Oubliés ou négligés pendant des décennies, Aimé Césaire et Frantz Fanon sont de nouveau lus et étudiés. Pourquoi ?

Césaire et Fanon nous disent beaucoup de choses sur ce qui s'est passé hier, à l'époque coloniale, et aussi sur ce qui se passe aujourd'hui, dans le contexte post-colonial tel qu'ils avaient commencé à le pressentir. Les valeurs du post-colonialisme, telles que portées par Césaire et Fanon, sont les valeurs de la reconnaissance des différences et des altérités.

Or, actuellement, vit en France la deuxième ou la troisième génération des personnes originaires du Maghreb ou de l'Afrique noire. Ces jeunes sont français mais leurs parents viennent d'ailleurs, avec des cultures, une religion différentes. Ils vivent dans des lieux où l'habitat est dégradé. Ils peinent à progresser dans le système scolaire. Ils recherchent des moyens pour vivre correctement dans une société à laquelle ils appartiennent objectivement et, en même temps, il y a incertitude identitaire.

Ce sont justement des sentiments qu'ont ressentis Aimé Césaire et Frantz Fanon. Césaire parle de la difficulté de la société antillaise à s'identifier. Cette population en grande partie descendante de l'esclavage, de la traite, est aussi, depuis 1848 et l'abolition, intégrée dans la nation française, avec ce dilemme de savoir si les Antillais sont des citoyens à part entière ou entièrement à part. Fanon, lui, a observé dans les années 1950 la solitude des immigrés algériens. Dans Peau noire, masques blancs, il dit leur difficulté à s'insérer dans un dispositif qui ne répond pas vraiment à leur identité.

L'identité. Les deux auteurs se seront posé cette question toute leur vie...

Césaire dit : "Nègre je suis, nègre je resterai." Il y a là un élément fondamental sur lequel il ne veut pas transiger. Il refusait cependant de considérer la négritude comme un enfermement. Lors d'un colloque à Miami, en 1987, il a expliqué comment cette notion était aussi une dénonciation du racisme.

Frantz Fanon, lui, serait un métis, au sens de l'identité : c'est un Noir martiniquais qui a vécu en Algérie et s'est impliqué dans les indépendances africaines. C'est un combiné de profils assez extraordinaires qui ont fait cet individu très complexe, absolument exceptionnel par sa densité existentielle et sociale. Mais, par des cheminements différents, ces deux hommes ont finalement tendu vers l'universel.

Fanon, combattant de la France libre puis partisan des indépendances, Césaire, chantre de la départementalisation puis auteur du Discours sur le colonialisme, ont eu des relations complexes avec leur pays. Quel rapport avec celles des jeunes des banlieues envers ce pays ?

De par leurs brillantes études, Aimé Césaire et Frantz Fanon appartenaient aux élites françaises. Ils auraient pu figurer comme modèles républicains et, en même temps, ils ont subi le racisme, notamment Fanon quand il étudiait la médecine à Lyon. En cela, ils rejoignent un état d'esprit amour-haine qui existe aujourd'hui chez les personnes issues de l'immigration. D'où cette incertitude, cette hésitation, ces allers-retours qui rendent compréhensible une certaine violence. Il est d'ailleurs intéressant de constater que la violence des agriculteurs, par exemple, est admise par la société, intégrée dans l'espace public, alors que celle des jeunes de banlieue ne l'est pas. Il y a là présent un racisme latent : prégnance du fait qu'ils restent différents et donc prégnance perpétuelle de l'imaginaire colonial.

Des parallèles sont justement tentés entre le système colonial, tel que décrit par ces auteurs, et ce que vivent les gens dans les cités. Vous semblent-ils à propos ?

Ils sont un peu excessifs parce qu'il y a quand même des garde-fous, comme la présence du système scolaire ou des grandes institutions. Malgré les difficultés que rencontrent encore beaucoup de jeunes, un certain nombre cheminent peu à peu dans notre société. Ce n'est tout de même pas la situation coloniale avec des barrages très forts dans la promotion. Mais il y a un ressenti. Les stigmatisations dont sont victimes certains Français issus de l'immigration incitent à rappeler ce contexte antérieur. Quelque part, ils se remémorent la situation des colonies où la ville européenne et la ville indigène étaient séparées physiquement et symboliquement.

Propos recueillis par Benoît Hopquin

source

"Aimé Césaire", de Romuald Fonkoua

Tenter une biographie d'Aimé Césaire, c'est prendre le risque du naufrage. Le Martiniquais a superposé trop de vies pendant trop d'années. Poète, homme de théâtre, maire, député, voyageur, historien, il semble tantôt esprit suspendu, tantôt boule d'action. Comment se défaire de la gangue de vénération ou de détestation qui a entouré, les dernières années, le vieil homme ? Romuald Fonkoua a choisi l'humilité. Le rédacteur en chef de Présence africaine (revue cofondée par Aimé Césaire) dresse de Césaire un portrait à plat, ce qui ne veut pas dire plat. Il évoque l'esprit révolté mais n'élude pas son (bref) apparatchikisme stalinien. Il met en exergue le penseur universel, mais n'occulte pas totalement son clientélisme politique. Le livre fait forcément quelques impasses et a quelques prismes. Mais il restitue au final un portrait distancié et juste du "Nègre fondamental"

Aimé Césaire, de Romuald Fonkoua, Perrin, 384 p., 23 €.

Benoît Hopquin

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mardi, avril 20, 2010

Haïti: Sa Contribution à la Lutte pour la Liberté dans le Monde

Jean Sénat Fleury,


http://www.jeansenatfleury.com/


"Haïti berceau de la lutte pour la liberté."

À l'occasion de la journée internationale de commémoration des victimes de l'esclavage et de la traite transatlantique des esclaves, l'Assemblée générale de l'ONU dans un hommage unanime à la première république noire et aux innombrables victimes de la traite négrière a salué la contribution énorme d'Haïti à la lutte pour la liberté dans le monde.

Le fait que la double révolution haïtienne –émancipation et abolition de l'esclavage- selon le professeur Anthony Bogues de la "Brown University" ait posé la question de la liberté, a conféré à ce mouvement une portée mondiale. Aucune autre révolution de cette période, ni l'américaine ni la française n'a posé cette question. Il faut donc cesser de voir Haïti comme une nation marginalisée de l'Occident et commencer à réaliser la contribution "historique" qu'il a apportée à la liberté humaine, élément central de l'édification du monde moderne.

La traite des esclaves et l'esclavage reste l'un des chapitres les plus horribles, brutaux et douloureux, non seulement de l'histoire de l'Afrique, mais de l'ensemble de l'humanité. Aussi, le fait qu'Haïti a réalisé la première révolution anti-esclavagiste dans le monde en chassant les Français de St-Domingue, cette révolution a détourné le coup de l'histoire. En effet, la victoire des troupes indigènes sur les troupes françaises à Vertières, a déjoué le plan de Napoléon Bonaparte dans son ambition d'occuper toute l'Amérique. Cette défaite de l'armée française composée d'un corps expéditionnaire mené par son beau-frère Charles Leclerc a été un coup fatal à l'empire français qui dispose à l'époque de la plus puissante armée au monde.

Ne disposant pas de moyens militaires suffisants en Amérique après la débâcle de ses troupes à Saint-Domingue, Napoléon a dû abandonner ses projets de reconstruction de l'empire français au Nouveau Monde, et le 11 avril 1803, quatre mois après la défaite de Rochambeau à Vertières, le ministre français du trésor, le marquis de Barbé-Marbois, propose à Livingston la vente de la Louisiane. Le 30 avril 1803, le traité est signé à Paris par Robert Livingston, James Monroe, Barbé Marbois et Michaël Ryan Toussaint. La France officiellement cède la possession de la Louisiane aux Américains et enterre du même coup le projet de conquérir l'Amérique.

Haïti, dès lors, isolée sur la scène internationale par des puissances impérialistes et esclavagistes et menacée par un retour éventuel des Français, n'a qu'un choix : Aider les autres pays de la région à se défaire des jougs de la colonisation. Le 6 janvier 1806, lorsque Ferrand s'avisa de publier un arrêté qui "autorisait les habitants de l'Est et les troupes sous ses orders à capturer tous les Haïtiens qu'ils pourraient rencontrer pour être vendus comme esclaves dans les îles de l'archipel ; Dessalines prépara à la hâte une expédition. Le 5 février, il rentra dans l'Est, et le 7 mars il met le siège devant la capitale Santo-Domingo.

En février 1806, sur l'ordre de Dessalines, Magloire Ambroise a reçu Francisco de Miranda (leader Sud-Américain qui a combattu pour libérer l'Amérique Latine contre le régime espagnol) et donna des munitions à Miranda et des hommes en renforts pour combattre les Espagnols. Le mois suivant, le 12 Mars 1806, le pavillon vénézuélien fut créé dans le port de Jacmel.

Aider à libérer des peuples de l'Amérique Latine

Pétion et Bolivar se rencontrèrent à Port-au-Prince. Aux Cayes, Bolivar reçoit des armes et des munitions ainsi qu'une importante somme d'argent pour reprendre la lutte en vue de libérer les pays de l'Amérique Latine. En promesse à cette offre, il promet d'abolir l'esclavage partout où il sort victorieux. Il commença par appliquer cette mesure sur lui-même. Il libéra les 1.500 esclaves qui travaillaient sur son vaste domaine de San Matheo, près de Caracas sans condition (Mars 1816). Mais quand il décréta la liberté générale, tous les propriétaires d'esclaves, y compris ses lieutenants, se dressèrent, mécontents, et l'abandonnèrent. Battu le 10 juillet 1816, Bolivar se réfugia à Jacmel. Il y resta 6 mois. De retour dans son pays avec le support moral et financier de Pétion, il remporta des victoires à Junin, à Ayacucho etc. et proclama l'indépendance de Venezuela, de la Colombie, de l'Équateur, du Pérou, de la Bolivie.

Conclusion

La participation de 6 soldats chasseurs volontaires venus de Saint-Domingue parmi lesquels Henry Christophe pour combattre à Savannah dans l'Est de Georgia pendant la guerre d'indépendance américaine (1776-1783) est un autre fait qui illustre que même avant son indépendance, le pays a toujours contribué à la lutte de l'émancipation des peuples dévoués à l'idéal de justice protestant contre l'inégalité et l'oppression de l'homme par l'homme. Ainsi, si la communauté internationale a décidé de supporter le projet de reconstruction d'Haïti après le tragique tremblement de terre du 12 janvier 2010, ce geste n'est qu'un remboursement fait à la première république noire pour sa contribution à la lutte pour la liberté dans le monde.

dimanche, avril 18, 2010

En visite à la ‘Maison des esclaves’ : La Gouverneure du Canada au bord des larmes


Le Gouverneure du Canada était hier au bord des larmes. Gagnée par l’émotion suite à l’exposé du conservateur de la ‘Maison des esclaves’ de Gorée qu’il a visitée, Mme Michaëlle Jean a oublié un instant son titre de Première Dame du Canada pour partager son sentiment sur la traite négrière dont elle est issue.

‘Ce n’est pas facile de trouver les mots. C’est la deuxième fois que je suis, de si près, confrontée à cette histoire de celui-ci, en sol africain. Elle m’a été contée au Château d’El Mina, au Ghana, en 2006. Ce que je pourrais vous dire de façon très personnelle, c’est que cet océan, cette partie de l’Atlantique, m’a toujours angoissée. Pourtant, j’adore les côtes mais face à la mer d’ici, je ressens un profond malaise, je suis terriblement angoissée. Je crois que c’est quelque chose qui est logé dans la mémoire et qui revient. C’est quelque chose qui ressemble à un legs douloureux, à un legs ancestral et qu’on n’arrive pas à nommer. C’est comme si on entendait des voix, c’est comme si on sentait des présences, c’est comme si ça nous capturait’. C’est par ces mots, teintés d’émotion, que la très Honorable Gouverneure du Canada s’est adressée, hier, à la presse après avoir visité la Maison des esclaves, sise à l’île de Gorée.

C’est une dame presque au bord des larmes, parce que gagnée par l’émotion suite à l’exposé du conservateur de ce lieu mythique, qui a tenu à partager son sentiment sur la traite négrière dont elle se dit issue. ‘Je ne peux pas imaginer ce que ça a été, cette traversée mais quelque chose, dans ma mémoire, me dit ce que ça a été’, lâche-t-elle en soupirant. Pour Mme Michaëlle Jean, certes tout cela est difficile à imaginer, mais ce qui est très fort, c’est que la vie triomphe, c’est que nous sommes vivants mais aussi, ‘c’est que nous soyons revenus ici après 350 ans de cette traite abominable et pouvoir se rencontrer et d’être ensemble’. La Gouverneure générale voudrait que l’on sache que cette histoire n’est pas uniquement celle des peuples noirs. Selon elle, ‘c’est l’histoire de toute l’humanité, c’est un chapitre qui nous appartient et qui nous concerne toutes et tous, peu importe que nous soyons de descendance africaine ou européenne, d’esclaves ou de maîtres’.

Le plus important pour elle, c’est que ‘nous sommes ensemble’ pour mener un combat contre toutes les atteintes à la dignité humaine, contre tous les trafics humains, aujourd’hui encore, contre toutes formes d’esclavage, contre toutes les dépossessions de la liberté. Mais elle reste convaincue que, dispersés, les combattants de ces causes justes ne pourront réussir. Ce combat, c’est ensemble que devons le mener. ‘C’est ça la force, c’est ça la leçon qu’il nous faut tirer, c’est ce que ça m’inspire quand je suis dans ces lieux’, dira-t-elle émue.

Aguibou KANE

Renaître ou Ressusciter : le vrai combat de l’homme noir


La renaissance africaine ne doit certainement pas signifier faire ressusciter le continent comme s’il avait rendu l’âme au cours de son existence pénible : ce serait mal lire les événements, les faits historiques qui ont incontestablement parsemé d’embûches sa marche jusqu’ici. La renaissance africaine ne doit certainement pas signifier faire ressusciter le continent comme s’il avait rendu l’âme au cours de son existence pénible : ce serait mal lire les événements, les faits historiques qui ont incontestablement parsemé d’embûches sa marche jusqu’ici.

L’esclavage et la colonisation nous ont laissés intacts, vierges dans la foi et dans l’espoir d’une liberté prochaine, de la liberté éternelle. Le Nègre a, depuis ces moments sombres, vaincu la pusillanimité, la veulerie, la lâcheté et la peur de la mort biologique. Sa docilité relative dans l’acceptation de sa condition d’esclave ou de colonisé s’appuyait sur un credo solide et une espérance sans faille dans un jour prochain, un jour fait d’éclairci et de Liberté. Cet aïeul qui a accepté de plier sans jamais rompre, espérait tout juste une revanche et un rétablissement de sa splendeur, source de son difficile et long combat.

Je suis convaincu que la renaissance africaine dépasse de loin le symbolisme des commémorations ou les commémorations symboliques que l’on continue de nous servir depuis près d’un siècle. Elle est plus qu’un monument (fût-ce-t-il le plus haut du monde), plus qu’une date (faste et grandiose inauguration du fade édifice sur les Mamelles en ce samedi 03 mars 2010), plus que des résolutions creuses à l’Union africaine, plus que les rêveries fallacieuses et félonnes des usurpateurs de l’histoire du continent, plus que les pérégrinations intellectuelles au seul service du culte de la personnalité et du goût avancé du gigantisme pharaonique.

L’heure de la rupture a sonné : une heure de profonde et courageuse rétrospective, socle inaltérable au sursaut, au réveil, à une nouvelle conscience noire qui ouvrent enfin l’ère des perspectives, des visions justes et bien planifiées au seul service d’une Afrique émergente.

Cette nouvelle vision, ce nouveau souffre, cette enjambée, doivent s’articuler autour d’un puissant courant intellectuel et culturel qui «rend l’Afrique à l’Africain» ; je parle bien entendu de ce citoyen Africain qui n’a jamais été sujet de Sa Majesté ou petit-fils du Gaulois.

L’heure du décollage a sonné : il est temps de retirer la joue droite alors que l’autre a fini de recevoir un soufflet. L’Afrique réclame résolument sa place, une réelle reviviscence dans le concert des Nations
Pour ce, il y a lieu de rendre encore plus visibles la voix du continent et la voie nègre du développement.

LA VOIX DU CONTINENT NOIR DANS LE MONDE NOUVEAU

Une voix au continent noir, c’est quand nous aurons droit à la parole. Mieux, que cette parole fasse un impact tangible à l’Onu et dans les grandes instances de décision du monde. C’est quand nous saurons dire non aux ingérences de toutes sortes : surtout au paternalisme du monde occidental qui sonne comme une nouvelle forme de colonialisme. C’est dire stop à l’immigration choisie qui nous dépeuple de notre élite intellectuelle et artistique comme jadis la Traite négrière l’avait faite avec nos bras les plus valeureux. C’est mettre un frein au déversement quotidien des déchets toxiques sur nos sols, à la détérioration de la couche d’ozone qui menace chaque jour un peu plus notre existence. C’est prendre la responsabilité de se soustraire au diktat du Fmi et de la Banque mondiale qui nous étranglent et nous étouffent sciemment. C’est faire bannir la discrimination raciale avec son lot de brimades, d’incompréhensions et de calomnies. C’est savoir faire front commun contre la détérioration des termes de l’échange dans le commerce mondial où la part de l’Afrique scotche à presque 1% malgré le poids de nos phénoménales ressources minières et halieutiques. C’est aussi savoir parler d’une seule et unique voix pour dire stop aux dérives égoïstes, monarchiques et totalitaires de nos décideurs actuels. C’est lutter efficacement contre la mal gouvernance, les détournements abusifs de deniers publics et contre la fuite des capitaux. C’est aussi arrêter le pillage systématique de nos ressources minières et halieutiques. C’est une Afrique sans rebelles (les rebelles des uns couvés et armés par les autres), sans pandémies et autres épidémies qui nous épouvantent le quotidien. C’est se battre contre l’avancée du désert et la déforestation sauvage (très souvent l’œuvre des compagnies de bois plus proches des chasseurs de primes). C’est encore un continent dépouillé à jamais du spectre des guerres tribales et ethniques qui rappellent cruellement le Moyen-Âge. C’est prendre résolument à cœur le cauchemar de l’érosion et de l’appauvrissement lancinant et progressif des sols cultivables. C’est vaincre pour toujours les inégalités sociales, l’analphabétisme, le manque de formation viable des ressources humaines, la famine cyclique et rotative et enfin le manque effrayant d’eau potable. Tous ces manquements au sillage d’une Afrique essoufflée, demandent des issues vigoureuses ; ils dépassent le folklore des commémorations, le symbolisme creux et abstrait des monuments érigés à l’occasion et l’appel usurpateur à une ethnomusicologie biaisée de sa substance originelle.

UNE VOIE AUTOCHTONE VERS L’EMERGENCE


Une voie africaine du développement ne constitue en rien une chimère : il suffit de nous approprier notre continent. En s’appuyant exclusivement sur nos valeurs séculaires, sur nos réalités quotidiennes et sur notre rythme de vie, la voie africaine du développement n’est ni extrapolation, ni psittacisme mais une réelle application de la pensée négro-africaine faite de partage et de solidarité et essentiellement tournée sur un authentique pari sur le génie de l’homme noir. Elle s’articulera naturellement sur nos aptitudes d’harmonie avec la nature ; en termes plus clairs sur les activités agricoles, halieutiques et forestières. Ces activités protégées de toutes sortes de bradage, permettront à moyen terme le décollage réel d’une industrialisation du continent.

La voie africaine du développement, c’est encore travailler à mieux corriger la balkanisation en donnant aux grands ensembles des contenus plus visibles, plus lisibles, plus vivants, plus viables. Bref, c’est faire le choix salutaire du renoncement aux frontières nationales pour l’Unité économique, monétaire et même politique du continent.

Comment un «scandale écologique» comme notre continent (tant ses richesses minières sont énormes) peut-il se permettre de vivre dans ce dénuement absurde ? La famine avait-elle sa place sur nos immenses terres sillonnées de toutes parts par des fleuves, lacs et autres glaciers ? Nos coquasses réserves naturelles, nos sites historiques authentiques et célestes nous ont-ils servi à attirer les retombées du tourisme mondial ? Qu’avons-nous fait du pétrole, du diamant, de l’or, de l’uranium, de la bauxite, des phosphates et autres mines du sous-sol continental ? De la réponse courageuse à ces questions naîtra une voie africaine du développement : une voie qui partira de nous mêmes pour arriver à nous. S’approprier le continent ne signifie en rien un renferment sur soi ; il permettra plutôt aux Africains que nous sommes de répondre convenablement à l’appel du village planétaire (globalisation et mondialisation) et à la civilisation du donner et du recevoir. Jusqu’ici, qu’avons-nous proposé aux autres hormis le fait de tendre la main ?

La renaissance africaine passera forcément par l’action pour relever ces défis ; des actions concertées, réfléchies, mûries et renouvelées qui nous confèreront sans aucun doute une place honorable sur l’échiquier de la géopolitique mondiale. Penser au symbolisme abstrait des monuments et des commémorations inutiles et dépensiers de nos maigres deniers publics dans ces moments solennels, c’est trahir la cause africaine, c’est réduire l’émergence du continent au stade de rêve inaccessible et de désir inassouvi. Et pourtant, elle est possible cette renaissance dont on parle. Il suffit de se battre jusqu’au dernier souffle contre ces pseudos intellectuels et hommes de culture en mal d’inspiration qui ont choisi de brader l’halo de l’Homme nègre, l’ancêtre de l’humanité pour l’avoir sacrifié à des privilèges au cénacle des paraplégiques de la cause africaine.

Africains d’ici et de la diaspora, battons-nous convenablement et à l’unisson pour !
Amadou FALL - Dexc/Ide de Guinguinéo - Un défenseur de la Nation de la République /