Sur ATV, au journal de 19h :" les colons ont importés le cochon sauvage pour nourrir les esclaves qui s'étaient échappés". Ils va vraiment falloir les sanctifier : Ils ont partagés leur culture, ..., et fait en sorte que les esclaves marrons ne meurent pas de faim. Trop gentils !!! "
M. Symphor
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Réponse de Josépha Luce
Ce fut exactement le contraire. Lorsque les colons sont arrivés en Martinique, on trouvait des cochons sauvages. Mais deux ou 3 décennies plus tard, la voracité légendaire de ces mêmes colons avait occasionné l'extinction de la race des cochons sauvages (qui avaient été introduits par les Espagnols), de même que les perroquets, diable, lamantin, lézard... De toute façon tout le monde sait que le colon exécrait le marron, et tout esclave qui donnait la moindre bouchée de manger à un marron était puni d'un quatre-piquet plus ou moins long puis jeté dans la geôle d'habitation. Par conséquent, je ne vois pas trop bien comment ils leur donneraient à manger en même temps!
L'histoire et la sociologie de la caraïbe, des antilles et du monde noir. Naviguons dans le passé de la Martinique, de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Réunion et de l'Afrique
dimanche, mars 19, 2017
jeudi, mars 16, 2017
colonisation et nazisme
Olivier Mukuna : Après la commémoration française de « l’abolition de l’esclavage», à laquelle participait Nicolas Sarkozy, que pensez-vous d’une de ses déclarations : « La France n’a pas à rougir de son histoire. La France n’a jamais cédé à la tentation totalitaire. Elle n’a jamais exterminé un peuple. Elle n’a pas inventé la solution finale, elle n’a pas commis de crime contre l’humanité, ni de génocide … La vérité c’est qu’il n’y a pas eu beaucoup de puissances coloniales dans le monde qui ait tant œuvré pour la civilisation, le développement et si peu pour l’exploitation » ?
Jacques Vergès : C’est évidemment un discours de candidat… La question n’est pas de rougir ou même de se repentir. Il s’agit d’autocritique. La repentance évoque la religion ; l’autocritique, une attitude responsable. Simplement se dire : Voilà ce que nous avons fait et cela a aboutit à une catastrophe. Quelles erreurs, quelles fautes avons-nous commises pour en arriver là ? L’autocritique reste à faire pour l’esclavage, mais aussi pour la colonisation qui a commencé au 19ème siècle. Une période de printemps des peuples en Europe, mais de grands malheurs pour ceux d’Asie et d’Afrique. Pourquoi ? Parce qu’on a justifié par la science l’infériorité de ces êtres humains.
On convoqua Darwin pour asseoir une sélection naturelle selon laquelle les plus aptes doivent triompher des plus faibles. Darwin lui-même - qui possédait des qualités humaines -, déclare : « A l’échelle des siècles, il est évident que beaucoup de civilisations arriérées vont disparaître ». Sur cette base, nous, les Européens, avons estimé avoir des droits sur ces peuples jugés inférieurs. Le droit de conquérir leurs terres, le droit de les faire bosser pour nous et le droit de les détruire…
Lorsqu’on parle de génocide, on oublie souvent la Tasmanie. Par définition, cette île au large de la Nouvelle-Zélande était peuplée de Tasmaniens. Il n’y en a plus ! La dernière Tasmanienne est morte en 1877. Les colons anglais les chassaient au fusil et avec des chiens. En Australie, les Aborigènes n’étaient pas représentés. Les Anglais considéraient que ce peuple faisait partie de la faune.
Pour les animaux, on procède à une estimation, pas à un recensement…
Olivier Mukuna : Selon Sarkozy et d’autres, la France a davantage développé qu’exploité ses ex-colonies…
Jacques Vergès : Dans les colonies françaises, il y avait surtout le travail forcé… Prenez des modèles de réflexion subtile et modérée comme Tocqueville.
Cet auteur de textes très intéressants sur la fin de l’Ancien régime et la démocratie américaine disait aussi : « Avec les Arabes, il faut savoir brûler les récoltes, razzier les villages, faire prisonnier les femmes et les enfants » ...
Dans les années 20, Léon Blum, ce parangon du socialisme démocratique, écrivait : « Les races supérieurs ont des droits et des devoirs envers ceux qui ne sont pas parvenu au même degré de civilisation » …
En 1936, le docteur Schacht, grand bourgeois, banquier puis ministre des finances d’Hitler, rend visite à Léon Blum. Il lui dit : « Je suis opposé à un empire colonial en Europe ». C’est-à-dire à un système colonial visant des Blancs. « Mais je suis favorable à ce que l’Allemagne recouvre des colonies en Afrique », ajoute-t-il. Blum répond : « Je suis d’accord avec vous. Je vais intervenir auprès des Anglais afin qu’ils vous restituent certains territoires africains ».
Olivier Mukuna : Dans votre dernier livre (1), vous écrivez : « La colonisation est la matrice du nazisme ». Une affirmation qui provoque pour le moins débat…
Jacques Vergès : Bien sûr. Un exemple : A l’époque d’Hitler, il y avait toujours un SS silencieux qui notait les propos de table du Führer. Le culte du chef l’imposait. A la libération, ces carnets ont été saisis par les Russes, puis ont été publiés et traduits en Anglais et en Français.
En 1941-42, lorsqu’Hitler envahit la Russie, il dit : « Nous devons faire avec les Slaves ce que les Américains ont fait avec les Indiens : les chasser des villes et les obliger à vivre dans des lieux reculés ».
En 1943-44, la défaite arrive et les yeux du futur vaincu s’ouvrent. Hitler dit: « J’aurai dû exiger l’indépendance des pays d’Afrique du Nord pour que le feu prenne dans tout le monde musulman ». Il ajoute : « Les Chinois et les Japonais sont aussi civilisés que nous et peut-être l’étaient-ils avant nous ».
Au départ, Hitler se veut le continuateur des colonialistes. Hanna Arendt et Aimé Césaire le constatent aussi. Dans son Discours sur le colonialisme, Césaire écrit : « Quand M. Hitler s’est mis à éructer, cela vous a étonné en Europe. Nous, pas ! C’était le même discours que nous tenaient nos maîtres, sauf qu’eux pensaient que ces procédés colonialistes ne s’appliquaient qu’aux Arabes, aux Nègres ou aux Coolies et non pas à d’autres Blancs »... Il n’y a pas de doute : le nazisme est l’enfant du colonialisme.
[Paris Match Belgique, Bruxelles, 2007].
(1) « Que mes guerres étaient belles », Editions du Rocher, 2007.
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