Au cours de l'année qui se termine, de nombreuses manifestations (colloques, conférences, spectacles, publications) ont commémoré le huitième centenaire de la croisade contre les albigeois. Actuellement et jusqu'à la fin du mois se tient à la maison des Mémoires, 53 rue de Verdun, réalisée par les Archives départementales, une remarquable exposition qui fait revivre cette période dans toute sa complexité. Les documents présentés, en effet, au-delà de l'expédition guerrière et de ses conséquences, s'efforcent de faire revivre la société du XIIIe siècle.
Pour atteindre cet objectif, les diverses sources auxquelles a traditionnellement recours l'historien ont été mises à contribution : chartes et chroniques, œuvres d'art fresques, vitraux. Ces documents ont été complétés par des découvertes archéologiques, faites à Montségur mais aussi dans la Montagne Noire, qui ont permis de cerner de plus près la façon dont vivaient au jour le jour nos ancêtres du XIIIe siècle, en particulier les humbles.
Il s'agit en l'espèce du site de Cabaret, à Lastours, fouillé depuis de nombreuses années par Marie-Elise Gardel dans le cadre de l'Amicale laïque de Carcassonne, qui a livré de forts utiles documents. Les quatre tours visibles aujourd'hui sur ce site ont été construites après la Croisade, mais, en contrebas du château appelé Cabaret, un habitat constitué à partir de 1150 et déserté vers 1240 a été mis en évidence et étudié au cours de diverses campagnes. Ce bourg fut certainement rasé sur ordre de l'administration royale après la révolte de Raimond II Trencavel et la colline déclarée zone de servitude militaire ne fut à nouveau constructible qu'après le traité des Pyrénées qui en 1659, en annexant le Roussillon repoussait la frontière française plus au sud.
L'expulsion des populations ayant été sans doute précipitée, les archéologues ont pu découvrir, dans les restes des maisons, une série d'activités domestiques saisies e n quelque sorte comme sur une photographie prise en instantané : vaisselle, soc d'araire, ateliers métallurgiques apparaissent comme sur une photographie d'instantané. De plus, l'abondance des ossements de moutons, de chèvres, de bovins et de porcs, atteste de l'importance des activités pastorales.
L'alimentation et la vaisselle
Depuis le XIe siècle, d'importants défrichements avaient permis d'augmenter la production des céréales en mettant en culture des garrigues et des forêts Dans nos régions toutefois, le labourage se faisait toujours à l'araire, instrument en bois doté d'un soc en fer, mieux adapté que la charrue aux sols légers du Midi. La charrue en effet retourne les sols en profondeur, mais cela ne se justifie guère dans nos régions et favorise même l'érosion, appauvrissant la terre.Les céréales étaient les cultures essentielles car seules elles permettaient obtenir l'élément constituant la base de l'alimentation, le pain. Celui-ci d'ailleurs n'était pas obtenu à partir du seul blé, mais comprenait une part importante d'orge et de seigle.La vigne et l'olivier étaient cultivés sur les parties les plus pauvres, tandis que l'élevage des ovins fournissait le fumier indispensable aux cultures ainsi que la laine et le cuir pour habiller les hommes. Le pain accompagnait soupes et ragoûts dans lesquels la viande était rare, tandis que l'on consommait abondamment légumes, fèves et lentilles. Le poisson était le mets des jours de jeûne, tandis que produits laitiers et fruits complétaient les menus. Quant au vin, lorsqu'il apparaissait sur la table, il était généralement coupé d'eau.
Les poteries utilisées lors des repas avaient des formes différentes, ce qui, combiné avec la fragilité de ce matériau qui obligeait à des renouvellements rapides permet de dater maints autres découvertes archéologiques.
Les oules, de forme globulaire à col ouvert, servaient au stockage des denrées comme à la cuisson des aliments, les jattes, de forme ouverte avec un bec verseur, étaient utilisées pour servir le lait et les bouillies, alors que dournes et cruches étaient consacrées aux liquides.
La mixité sociale, qui semble réelle à Cabaret, apparaît dans la présence de verres à pied, réduits évidemment aujourd'hui à quelques fragments, tandis que la vaisselle en bois a disparu. D'autres éléments de cette vie quotidienne méritent de retenir l'attention, comme nous le verrons prochainement.
On consultera avec profit : « Au temps de la Croisade ». « Société et pouvoirs en Languedoc au XIIIe siècle ». Archives départementales de l'Aude. 2009.
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